20/12/2013
Robot?
Il y a 60 ans, Alan Turing, pionnier de l'informatique et grand décodeur définissait un test qui devait permettre de différencier un robot d’un homme. Il semblerait que Cleverbot soit capable de déjouer le test de Turing.
Par contre un robot mis au point par un compagnie d'assurance, et répondant au nom de Samantha West, n'a pas trompé Michael Scherer, journaliste au TIME. Du coup, plusieurs journalistes ont appelé Samantha. La compagnie a déconnecté le numéro de téléphone.
Le prochain robot sera sans doute capable de dire "Non, je ne suis pas un robot, voulez-vous que l'on parle de Turing ou préférez-vous écouter un poème de Baudelaire, à moins que vous ne préfériez parler de votre couverture maladie ?"
16:42 Publié dans Questions essentielles | Lien permanent | Commentaires (0) |
16/12/2013
Famille
A travers le temps et les sociétés, la famille semble être une des structures les plus pérennes qui soit…
Et pourtant, chez nous, la famille et la société changent. Parmi les qualificatifs appliqués à ces familles nouvelles, on trouve les termes de nucléaire (par opposition à la famille traditionnelle dite multigénérationnelle ou clanique), disloquée, éclatée, monoparentale, biparentale recomposée (donc après décomposition). Maintenant, elles peuvent être aussi légalement biparentales mâles et biparentales femelles. Étonnant non ?
Mais les anthropologues ont mieux dans leurs tiroirs...
Chez les Nayar de la côte de Malabar (Inde), les guerriers ne pouvaient fonder une famille. Les femmes, mariées nominalement à un guerrier, étaient autorisées à prendre des amants. Les enfants appartenaient à la lignée maternelle, l'autorité et les gestion des terres étant aux mains des hommes de la lignée, frères des femmes, eux-mêmes amants occasionnels des femmes d’autres lignées. C’est une famille appelée matricentrée.
Si l’on en croit Françoise Héritier, le mariage entre femmes est légal depuis longtemps chez les Nuer du Soudan. Cependant, chez eux, la filiation passe exclusivement par les hommes. La fille n'appartient pas à la famille de son père, sauf si elle est stérile. Stérile elle compte comme un homme et perçoit des parts des dots versées pour ses nièces. Avec ce capital, elle peut « acheter » une jeune fille qu’elle épouse légalement. Elle lui choisit un homme, un étranger pauvre, pour engendrer des enfants. Ces enfants sont les siens (ceux de la fille stérile, faut suivre) et l'appellent " père " et elle leur transmet son nom.
Son épouse l'appelle " mon mari ", lui doit respect et obéissance. Elle la sert comme elle servirait un vrai mari. Elle-même administre son foyer et son bétail comme un homme. Au mariage de ses filles, elle reçoit à titre de père, le bétail de leur dot et ensuite remet au géniteur la vache, prix de l'engendrement. Le géniteur ne tire (en principe) aucune autre satisfaction matérielle, morale et affective du contrat. Rassurez-vous, la femme-époux n'est qu'un ersatz d'homme et ce mariage légal reste tout à fait dans les canons machistes.
Chez les Yorubas du Nigeria, c'est une femme riche et non stérile qui peut légitimement épouser d'autres femmes et en avoir de la même façon substitutive, des descendants bien à elle. Attention, il est exclu de voir dans ces unions purement familiales une forme particulière d'homosexualité féminine. Honi (1 n) soit qui mal y pense, comme il est écrit sur la jarretière de la mariée.
Un autre jour, je vous parlerai des mariages fantômes, des vivant et des morts, aussi fréquent que le mariage entre vivants, chez les Nuer. Utile pour l’héritage en cas de mort sans descendance. Le mort peut ainsi devenir père de famille en toute immortalité.
17:28 Publié dans Au fil de la toile, Société | Lien permanent | Commentaires (10) |
15/12/2013
Dans l'espace
En 2007, la Malaisie a envoyé son premier astronaute dans l’espace Sheikh Muszaphar Shukor pour séjourner dans l’ISS. Comme nombre de ses compatriotes, Muszaphar est musulman. L’islam est même religion d’état en Malaisie.
Du coup, se posait un problème de taille : comment prier dans l’espace ?
Ne voulant pas se montrer rétrograde, le ministère du développement de l’islam fit une note pour le sermon du vendredi dans les mosquées expliquant que les voyages dans l’espace étaient autorisés car ils permettaient de comprendre les mystères de l’univers. Un séminaire de deux jours sur l’islam dans l’espace fut rapidement organisé.
Les docteurs de la foi faisaient face à plusieurs problèmes : l’ISS tourne 16 fois par jour autour de la terre, fallait-il prier 80 fois par jour ? Comment se tourner vers La Mecque depuis là-haut ? Comment se prosterner dans un espace aussi réduit ? Comment faire ses ablutions en économie d’eau ? Plus quelques petits soucis annexes…
Problème supplémentaire, on était en plein Ramadan, comment déterminer la période journalière de jeune ?
L’islam malaisien est moderne, il fut décidé de garder le temps de départ dans l'espace pour les prières, l’astronaute peut aussi choisir sa direction, il peut même se passer de la prosternation physique (la mentale reste nécessaire), s’il jeune il doit choisir les heures de son départ. La femme astronaute doit rester couverte sauf la face et les mains. En cas de mort dans l’espace, le corps doit revenir sur terre pour le rite, si ce n’est pas possible des funérailles spatiales sont exceptionnellement autorisées.
Il existe aujourd’hui aussi des fatwas (avis juridique donné par un spécialiste de loi islamique) égyptiennes et guinéennes qui complètent le “Guideline for Performing Islamic Rites at the ISS” de la Malaisie.
"Et Dieu dans tout ça ?" demandait Chancel à G. Marchais.
09:05 Publié dans Au fil de la toile, Religion | Lien permanent | Commentaires (2) |
14/12/2013
Prières
[Photo AFP]
Une des cinq piliers de l’Islam consiste à effectuer conscien-cieusement sa prière cinq fois par jour.
Pour ce faire, les échoppes saoudiennes ont coutume de fermer quelques minutes. Mais avec les super et hyper marchés la chose est moins facile nous dit Arab News relayé par Courrier International.
Certes, dans les hyper, des espaces ont été aménagés. Le rituel dure normalement entre cinq minutes et un quart d'heure mais certains employés traînent pour s’y rendre et en revenir ou peut-être prennent pas mal de temps pour prier ou encore se baladent-ils dans les rayons pour draguer. Quoi qu'il en soit, les patrons sont mécontents mais peuvent-ils risquer de blâmer la piété de leurs employés ? Que va penser Allah s'ils sévissent trop durement ?
De plus, pendant ce temps les rayons restent ouverts laissant le champ libre aux voleurs mécréants qui ne craignent pas Allah ni même de perdre une main ou les deux sous la hache du bourreau selon les sympathiques coutumes du pays.
Ils serait question de faire la prière par roulement dans les marché hypers et supers et aussi dans les stations-service.
Qu'en pense le Coran et les défenseurs de la foi ?
N'y aurait-il pas quelque chose de pourri (et de très mercantile) dans le royaume des Al Saoud ?
14:31 Publié dans Au fil de la toile, Religion | Lien permanent | Commentaires (10) |
13/12/2013
Spirale
Stanisław Ulam est né à Lviv, aujourd’hui en Ukraine, en 1909. Il entra aux USA en 1938 comme boursier à Harvard. En 1943, son ami mathématicien John von Neumann l'invita à Los Alamos, où se construisait secrètement la bombe atomique. Joueur, il suggéra d'employer la méthode de Monte-Carlo pour évaluer les intégrales mathématiques difficiles qui apparaissent en modélisant les réactions nucléaires en chaîne.
Ulam montra que le précédent modèle de la bombe H était inexact. Il fut le premier à théoriser la bombe H allumée par une bombe A. Il travailla à la théorie des ensembles, la topologie, la théorie ergodique, et d'autres domaines des maths.
Un jour qu’il s’ennuyait grave lors d’un congrès de mathématiques, il commença sur un papier quadrillé à noter les nombres entiers en spirale. Et chose surprenante, les nombres premiers apparaissaient dans les diagonales. On retrouvait sur une diagonale les 40 nombres engendrés par le fameux polynôme d’Euler x² + x + 41... Mais finalement rien de bien nouveau.
Du coup, Ulam conscient que ses gribouillages n'aboutissaient pas à grand chose, abandonna ce sursaut de fantaisie et retourna donner des conférences sur la relation entre science et moralité, à la grande déception des amoureux de nombres premiers comme Paul Erdős.
Spirale 250 par 250
10:11 Publié dans Mathématique | Lien permanent | Commentaires (0) |
12/12/2013
Cossery
A la mort d'Albert Cossery, en 2008, il fut beaucoup question de Mendiants et Orgueilleux, son chef-d’œuvre. Ce livre réédité récemment raconte une histoire qui se passe au Caire. Gohar, philosophe devenu mendiant, part à la recherche de son ami et admirateur, le laid et heureux Yéghen, pour obtenir sa dose de hachisch. Il rencontre Set Amina, la mère maquerelle et Nour El Dine, policier homosexuel, qui enquête sur le meurtre d'une jeune prostituée...
Gohar s'est fait mendiant pour mieux stigmatiser l'hypocrisie et les bassesses d'une société injuste et brutale.
Pour adapter en BD le livre culte de Cossery, le dessinateur Golo s'est plongé dans les rues du Caire. Il fait vivre des personnages qui résistent par la dérision, où se mêlent la verve poétique du langage et la truculence des postures. Dans Mes mille et une nuits au Caire (éd. Futuropolis), Golo donne les clés du jeune homme qu'il était en 1974, qui, après avoir lu Mendiants et orgueilleux, est parti vivre au Caire et n'en est jamais revenu.
Albert Cossery vécut une vie de dilettante. Il vivait à l'hôtel, préservait la sieste, parcourait chaque jour le même circuit parisien, et, de temps à autre, écrivait une phrase toujours parfaitement ciselée. Profil aigu comme son ironie, mèche rebelle, cravate délicatement nouée. Albert Cossery est mort dans son sommeil fidèle à ses principes de farniente.
Un reportage passionnant de la télé suisse en 1991 :
Si vous avez l'eau à la bouche, allez voir le reportage en entier ici.
10:22 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (0) |
11/12/2013
Sobriété
Albert Cossery et Paul Erdös avait deux points en commun : Il sont nés il y a un siècle, en 1913, et ils ont tous deux vécu dans la plus grande sobriété.
Albert Cossery est né au Caire dans un famille syro-libanaise d’origine grec. A 18 ans, il écrit en français « Les hommes oubliés de Dieu » qui sera publié par Henry Miller aux Etats-Unis. En plus de soixante ans d’écriture, il publie très peu de livres tous habités par d’êtres marginaux, voleurs ou fainéants philosophes qui cultivent l'humour comme la dérision.
À la question : « Pourquoi écrivez-vous ? », Albert Cossery répond : « Pour que quelqu'un qui vient de me lire n'aille pas travailler le lendemain »… Il vivra 60 ans à Paris à l’hôtel Louisiane dans une pauvreté revendiquée et une joie de vivre chaque jour renouvelée. C’est là qu’il meure en 2008.
Paul Erdös est né à Budapest, hongrois, d'origine juive, célèbre pour son excentricité, le nombre de ses publications scientifiques (environ 1 500) et de ses collaborateurs (plus de 500). La vie de Paul Erdős a été tout entière consacrée à ses travaux de recherche.
Célibataire endurci, comme Cossery, vivant dans un grand dénuement, il possédait une vieille valise et un sac plastique orange de supermarché ; sa seule possession importante à ses yeux était son petit calepin.
Chercheur très prolifique, toutes disciplines confondues. Il touche à tout, théorie des graphes, théorie des nombres, combinatoire... et améliore sans cesse l'élégance de ses démonstrations.
Dans sa chambre, en plus de ses livres, Cossery était riche de ses idées et de ses relations dans le monde des lettres, JP Sartre, Albert Camus, Boris Vian, Henry Miller, les surréalistes, des peintres, Picasso, Cézanne, Man Ray… En plus de sa valise, Erdöss, quant à lui, était riche de ses solutions mathématiques et de ses collaborateurs, plus de 500 signeront au moins un papier avec lui.
Ce sont les nombres 1 de Erdös, autre fantaisie mathématique…
Citations de Paul Erdös:
Peut-être bien que Dieu ne joue pas au dés avec l'univers, mais bon sang, il y a quelque chose d'étrange avec les nombres premiers.
Il y a trois stades à quoi on reconnait qu'un mathématicien devient sénile. Le premier, il oublie son théorème, le second, il oublie de fermer sa braguette, le troisième, il oublie d'ouvrir sa braguette.
Le télévision a été inventée par les russes pour détruire l'éducation américaine.
21:26 Publié dans Lecture, Mathématique | Lien permanent | Commentaires (1) |