17/03/2013
Boson suite...
Grâce à un fidèle lecteur versé dans le travail de la particule, on peut continuer de suivre ici le sort du fameux boson qui court sous la frontière franco-chuisse.
Je vous traduis ici le communiqué du 14 mars 2013 et les nouveaux résultats.
"Après avoir dépouillé 2,5 fois plus de données qu’en juillet, les physiciens ont trouvé que la particule ressemblait de plus en plus à un boson de Higgs (qui donne de la masse aux autres particules).
Il reste une question ouverte « Est-ce le boson du Modèle Standard ou est-ce le plus léger de bosons prédit par certaines théories au-delà du Modèle Standard ? »
That is the question !
Le communiqué ajoute : Répondre à la question va prendre du temps...
Je commente : Faut bien justifier tous la masse… salariale du CERN !
Le communiqué répond que, Boson de Higgs ou pas il interagit avec les autres particules. Et toc !
Je demande : Pouvez-vous préciser ?
Le communiqué répond : Par exemple, le boson de Higgs n’est pas supposé avoir de spin (doctor*) et dans le Modèle Standard sa parité (le comportement de son image dans un miroir) doit être positive. On a comparé de nombreuses options pour la parité du spin de la particule (trouvée au LHC) et toutes concluent à "pas de spin et parité positive". Ces résultats, plus d'autres mesures d’interaction avec d’autres particules, indiquent que ce serait bien un boson de Higgs.
Et pour continuer de justifier la masse le directeur indique en commentaire que ces résultats sont magnifiques, qu’on bosse sans doute sur le boson mais que cela va prendre encore pas mal de temps avant de savoir de quel boson de Higgs il s’agit, que ce superbe résultat est le travail de nombreuses personnes dédiées à leur job et que le programme de mesure du Higgs sector ( ?) est en bonne voie. Il faudra, par exemple, mesurer avec précision la vitesse à laquelle le boson se désintègre en d’autres particules. Sachant qu’il faut mille milliards de collision proton-proton pour observer un boson, la recherche de la désintégration demandera encore pas mal de données (et donc un max de masse… salariale).
Merci de votre attention et vive la science !
* Un « spin doctor » est un conseiller en communication. Le terme est généralement porteur d'une connotation négative : la pratique a montré que le spin doctor n'agit pas toujours de façon morale notamment du fait de l'emploi de la technique dite du Storytelling. (Bien sûr ceci n'a absolument rien a voir avec cet article qui parle de science et la science ne raconte pas d'histoire, elle traite de la Vérité.)
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13/03/2013
Robert Castel
Robert Castel est mort hier. Ce n'était pas un comédien, bien qu'il ait un homonyme acteur, toujours vivant lui. Robert Castel était le sociologue de l'insécurité sociale et de la désaffiliation.
Il fut prof à Lille de 1960 à 1967, puis Raymond Aron lui propose de le rejoindre à la Sorbonne. C'est dans ces années là qu'il rencontre Pierre Bourdieu, avec qui il commence à travailler, abandonnant la philosophie pour la sociologie.
Après mai 68, il enseigne au département de sociologie de l'Université de Vincennes. Dans les années 1970, il s'intéresse à la psychanalyse et à la psychiatrie, ainsi qu'au traitement et à la prise en charge des malades mentaux, en établissant une sociologie critique de ces questions et en se rapprochant de Michel Foucault, dont il reprendra l'approche généalogique. Il est à l'origine de la constitution du Groupe d'analyse du social et de la sociabilité (GRASS).
Dès les années 1970 et la montée inexorable du chômage, on assiste à la remise en cause de certains acquis, à la montée de la précarité et de l’incertitude sociales, qui marqueront les générations suivantes nées dans l’après plein-emploi. Robert Castel utilisera le terme de «désaffiliation», exclusion du monde du travail et isolation sociale, pour désigner ces nouveaux exclus du contrat social. Car ce qui est nouveau avec la remise en cause de la société salariale, ou plutôt, ce qui n'était que trop connu de l'histoire des sociétés humaines, c’est le retour de l’insécurité sociale: l’inemployable, le surnuméraire, l'exclu, redeviennent des réalités avec lesquelles notre société doit composer.
Voici une petite video où il parle de la cohésion sociale. Une autre ici sur la citoyenneté sociale.
22:46 Publié dans Au fil de la toile, Science | Lien permanent | Commentaires (2) |
24/02/2013
Crabe et ordi
Un article à lire sur huffingtonpost intitulé
L'agonie du cancer a commencé.
Il retrace les étapes dans la connaissance de la maladie et l'essor incroyable de la génomique, cette analyse du génome rendu possible grâce aux progrès exponentiels de l'informatique et qui constitue la clef du problème. Il prédit une maîtrise (pas la fin du crabe) de la maladie vers 2025 et un monotoring des personnes en bonne santé. Des implants donneront l'alerte dès l'apparition de la première cellule cancéreuse dans l'organisme... dans les prochaines années.
Il décrit les progrès fulgurant du séquençage de l'ADN à l'échelle du génome entier (21 000 gènes et leurs séquences régulatrices, tout notre programme à chacun), arme décisive dans la lutte contre cette maladie :
- En 2003, pour la toute première fois, le génome d'un homme a été intégralement séquencé. Cet exploit retentissant, que d'aucuns pensaient impossible, a coûté 3 milliards de dollars et demandé treize ans d'effort à un consortium international.
- Depuis, en dix ans, le coût du séquençage a été divisé par 3 millions ! La même opération de lecture de l'ADN ne coûte plus en effet aujourd'hui que mille dollars et se fait en trois heures.
- D'ici 2020, on pourra séquencer l'ADN de tout un chacun (en deux minutes) pour le prix d'une paire de baskets en solde !...
Qui aurait imaginé, il y a disons trente ans, que l'informatique allait résoudre le problème numéro 1 de la médecine ?
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05/01/2013
Médecine
Cyclops, Drancunculose et... hyéroglyphes.
Le cyclops est un punaise aquatique de 2 à 4 millimètres et qui a un seul œil comme son nom l’indique. Le problème du cyclops, c’est qu’il véhicule quelques maladies de type parasitose, entre autre le ver de Guinée.
Le ver de Guinée provoque la Drancunculose. Rien que le nom, ça fout déja la trouille ! Ce ver effectue un circuit Homme–Cyclops–Homme. L’homme boit le cyclops qui se digère bien mais pas le ver minuscule qui l’infecte. Un an après l’ingestion le ver se déplace à l’intérieur du corps avant de ressortir, en général, au niveau du pied, de la jambe et rarement du bras. L'homme entre dans l'eau et réinfecte les cyclops de la gouille. Dans le corps humain, la femelle peut mesurer un mètre de long pour un diamètre de spaghetti. S’en suit bien sûr un oedeme, une cloque, de la douleur avec la fièvre et même des complications bien pires.
Je sais, c’est assez dégueu mais c’est pas fini. Pour sortir le ver de Guinée du membre où il s'est installé, la seule solution est de l’enrouler autour d’un bout de bois et de tirer quelques centimètres par jour. Cela peut prendre plusieurs semaines dans des douleurs atroces.
Il existe des médocs mais, d’après les médecins, il vaut mieux faire le coup du bois de bois .
Je vous raconte ça parce que je viens de découvrir le Papyrus Ebers. Ce papyrus est l'un des plus anciens traités médicaux qui nous soit parvenu : il aurait été rédigé il y a 36 siècles pendant le règne d'Amenhotep Ier. Découvert par Edwin Smith à Louxor en 1862, il fut acheté ensuite par l'égyptologue allemand Georg Moritz Ebers, à qui il doit son nom et sa traduction.
Le papyrus Ebers est écrit en égyptien hiératique. Le parchemin est long de 20 mètres, soit 110 pages, il contient plus de 700 formules magiques et remèdes, d'innombrables incantations pour détourner les démons qui causent les maladies, mais aussi des connaissances empiriques. On y parle du cancer et les maladies psychiques y sont traitées sans distinction des maladies physiologiques. Enfin pour le traitement de la Drancunculose, le papyrus recommande d'extraire le ver de Guinée avec un bâton. Etonnant non ?
11:43 Publié dans Au fil de la toile, Science | Lien permanent | Commentaires (2) |
29/12/2012
Boson-zon
De quoi, de quoi ? Un lecteur assidu m’indique que le boson de Higgs ne serait pas écossais comme Peter mais belge comme François et Robert. Je viens d’avoir la nouvelle et je ne voulais pas que l’année se termine sans avoir tirée cette affaire au clair. D'autant que ce blog se flatte de suivre la physique quantique à la culotte... Cordes, Masse, Bose, Re-masse, LHC, LHC encore, Fusion froide, Univers, etc..
Par chance, j’ai retrouvé un numéro du Figaro (l’organe de l’UMP, 100% infos de qualité) qui passe l’affaire au bleu (de lessive, pas encore au bleu Marine).
Le physicien Peter Higgs reconnaît lui-même devoir partager la paternité de sa particule avec plusieurs collègues, aux premiers rangs desquels deux Belges, Robert Brout et François Englert. »
François Englert et Robert Brout sont victimes d'une grande injustice. Les deux physiciens belges ont co-écrit le premier papier publié sur le boson scalaire en août 1964 dans la Physical Review Letters, et c’est l’écossais Peter Higgs qui a donné son nom à la particule, grâce à un article publié trois mois plus tard dans la même revue.
Il faut savoir que les trois hommes se sont inspiré d’un physicien, japonais, Yoichiro Nanbu, qui permettait d'apporter une réponse satisfaisante à un problème théorique profond, celui de la masse d'une particule appelée boson intermédiaire. Attention, c'est du lourd !
Mais, l'idée était dans l'air du temps, trois autres chercheurs, Gerald Guralnik, Carl Hagen et Tom Kibble, ont eux aussi publié un papier très similaire avant la fin de l'année 1964, toujours dans le même journal. Certains manuels de physique appellent d'ailleurs le mécanisme décortiqué indépendamment par les six chercheurs, mécanisme de Brout-Englert-Higgs-Hagen-Guralnik-Kibble. On a donc affaire à un boson de BEHHGK et même NBEHHGK si on ajoute le japonais Yoichiro de son prénom.
A noter que Higgs, n’arrête pas de dire que ce boson n’est pas le sien. Et François Englert n’en veut pas non plus, il veut qu’on l’appelle « boson scalaire ». Nous voilà bien ! Higgs et Englebert pourraient donc avoir le Nobel pour un boson dont ils ne veulent ni l’un ni l’autre. Il est trop tard pour nobeliser Brout décédé en 2011.
Pour info, Gerardus 't Hooft, professeur à Utrecht et le professeur emeritus Martinus J. G. Veltman, du Michigan, USA, ont reçu le Nobel et 1999 pour avoir formalisé l'existence d'une particule associée au champ scalaire.
* Scalaire en mathématique désigne (en gros) un élément (une grandeur, un bidule) suffisamment défini par un nombre par opposition aux éléments vectoriels.
Le mot vient de scala qui veut dire marche d’escalier (scalae) et qui a donné escalier, escabeau, escabelle (pour bricoleur belge uniquement), escale, escalade, échelle, échelon échafaud, échasse, échalas...
Au féminin, scalaire est aussi un mollusque (photo) et au masculin un poisson (photo du haut)
18:07 Publié dans Mots, Science | Lien permanent | Commentaires (0) |
04/12/2012
Darwin 3
Chaque jour apporte de nouvelles lumières sur l’évolution sans, pour l’instant, ébranler la théorie de Charles Darwin.
Pour l’homme, tout est dans le pouce et... dans la mâchoire.
L'homme et le singe ont des gênes identiques à 99 %. Un des gênes qui diffère entre les deux espèces est celui qui active le développement du pouce opposable, un doigt important chez l'homme qui permet la créativité et diverses fonctions. Pourquoi les singes n’ont-ils pas un pouce opposable ? C’est encore une histoire de switch. Si on transfère à des embryons de souris, ces switches du pouce trouvés dans l’ADN humain en ajoutant un petit coup de marqueur bleu, la souris va développer un gros orteil et un pouce bleu ! Voilà !
Mais il ne suffit pas d’avoir un pouce, encore faut-il avoir le cerveau qui va avec. Mais pourquoi notre cerveau est-il nettement plus gros que celui du chimpanzé ?
Hansell Stedman va découvrir quelque chose de surprenant. Stedman est un spécialiste des muscles. Il s’intéresse de près à certains défauts musculaires dont deux des ses frères sont affectés. En analysant l’ADN, il découvre un gène qui provoque une défectuosité du muscle et... surprise, tous les hommes ont ce défaut et pas les singes. Il découvre alors que ce gène sain chez le gorille est responsable du muscle de la mâchoire. Du coup nous avons une mâchoire un peu faiblarde alors que le gorille avec son muscle mâcheur quadriceps peut casser des briques avec ses dents.
Mais, quand on a une telle mâchoire, les os du crâne sont bloqués. Chez nous, la fontanelle peut grandir jusqu’à 30 ans et donc le cerveau peut grossir. C’est dans le cortex, la partie superficielle que se loge les dons pour le langage, la musique, les maths… Ce serait donc parce que nos muscles de la mâchoire sont faibles que notre cerveau est fort. Pas de quoi se vanter mais cela n’encourage pas non plus à faire du sport.
Il reste encore beaucoup de choses à étudier. Par exemple : Est-ce qu’en injectant les switches du pouce humain à des poissons, les chercheurs verront des poissons qui font de l’autostop sous-marin ? Est-ce si on transfère les switches de la mâchoire faible à un chimpanzé, on pourrait en faire un haut fonctionnaire acceptable ? Si on switche les pattes des serpents à ON, est-ce qu’il seront aussi rapides que des lézards ? Quid des baleines à pattes qui envahiront la terre ferme ? De bons sujets pour Spilberg.
Bref, si mon résumé vous a donné envie, regardez donc cette très bonne émission.
21:16 Publié dans Au fil de la toile, Science | Lien permanent | Commentaires (3) |
03/12/2012
Darwin 2
Résumé de l'épisode précédent... L'ADN permet d'en savoir plus sur l'évolution mais est-ce si simple ? Comment allumer la lumière ?
On sait depuis un certain temps que tout le matériel de notre ADN n’est pas utilisé. On pensait qu’il y avait des gènes qui s’exprimaient et des qui restaient peinards dans leur coin de noyau, des gènes que l’on appelle « gènes poubelle ».
Bien sûr, ce n’était pas si simple. En cherchant quel gène provoquait tel ou tel caractère, les chercheurs découvrirent que parfois le gène existait dans le génome (l'ensemble des chromosomes) mais pas le caractère correspondant. Merde alors !
Exemple, chez la drosophile, une petite mouche très étudiée car plus facile à dompter que les lions ou les tigres, certaines ont des tâches noires au bout des ailes, car chez cette espèce de drosophile la tache noire au bout des ailes est du dernier chic et vous attire tous les partenaires sexuels que vous souhaitez. Oui, parce que pour transmettre ses gènes, il ne suffit pas de survivre, encore faut-il se reproduire. D’autres drosophiles n’ont pas de taches car dans cette espèce, la femelle se fout des taches, d’ailleurs chez la droso sans tache la parade nuptiale est réduite à presque rien (this fly is less dancing). Problème, la droso tachetée et la droso pas tachetée ont le même gène pinceau dans leur ADN. Parfois le pinceau peint, parfois non. Pourquoi ?
Les chercheurs observent que, dans les gènes poubelle, une mini séquence est différente entre les deux drosophiles. Pas embarrassés, ils greffent la mini séquence de la tachetée à la pas tachetée et ajoute un gène de méduse luminescente pour rigoler. Facile ! (Un conseil, si on veut vous greffer un gène de méduse pour aller en boite de nuit, refusez !) Résultat les ailes de la droso-pas-tachetée se retrouvent avec des tâches luminescentes. On a vérifié cela avec des rats du désert plus ou moins foncés et d'autres bestioles... Les chercheurs ont appelé ces séquences des switches, qui, en bon français sont donc de interrupteurs. On a découvert pas mal d’interrupteurs qui inhibent où déclenchent certains gènes très complexes. Un coup ON/ un coup OFF. On reste médusé.
Du coup, on est revenu voir les gais pinsons de Darwin pour constater qu’ils avaient tous les gènes de becs mais que suivant les cas ils étaient switchés ou non. Alors, la science est partie sur les traces d’une autre intuition de Darwin : A l’état embryonnaire, les espèces ont des caractéristiques d’autres espèces. Par exemple, les baleines, les lamantins, certains poissons auraient des embryons de pattes. L’évolution ne fait pas que favoriser un caractère soudainement apparu mais ce caractère peut être là en puissance et être ou non switché ON ou OFF.
Mais, ce n'est pas tout. Il y a aussi des histoires de machoires et de pouce. Ce sera pour demain.
17:40 Publié dans Au fil de la toile, Science | Lien permanent | Commentaires (0) |