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24/06/2007

La Leçon -3-

medium_heidi.jpgLisez 

la leçon de choses

 en un jour 

pour savoir pourquoi Alain Bagnoud a mis Heidi en tête de la liste des quatre livres de son enfance.

Est-ce que j’aurais pu écrire le livre d’Alain Bagnoud ?

Sans doute pas dans la forme. Son écriture est évidemment très personnelle. Son style est agréable, très lisible, pas de mots savants, un vocabulaire adapté à l’histoire sans recherche excessive, du patois de ci de là dont j’aurais pensé qu’il ressemblerait plus au mien, le patois d’Abondance, pas très loin du Valais, à vol d’oiseau. 

Dans le fond on a vécu tous les deux la fin d’une époque dans deux lieux semblables en ce qu’ils étaient les derniers à recevoir la sacro-sainte civilisation de l’aspirateur et de la tourniquette à faire la vinaigrette. Avec Alain nous avons neuf ans d’écart et j’aurais pensé, a priori, que, vivant en Suisse, il n’avait pas connu ce monde là. Eh bien si et il nous le fait bien revivre.

J’hésitais sur le morceau à numériser.  J’aurais aimé vous mettre la négociation à propos des vieilles granges et comment le grand-père s’en sort magnifiquement à coup de proverbes en patois face à l’arnaqueur sans scrupule. A propos de patois :

"Le patois, c'était le passé, la lourdeur figée, la boue, les odeurs de fumier, les vieux appartements mal aérés. Le carcan des traditions. Les modèles de comportement obtus. Les reproches muets et culpabilisants. Une lourdeur bête comme de la graisse figée qui enrobait une société pétrifiée, épaisse, irrespirable, étouffante.

Augustine (le régente un peu bornée) avait raison. Elle faisait bien de s'irriter contre les vestiges de ce dialecte chez Delphine, de s'acharner à en arracher les racines qui résistaient, qui se réfugiaient dans des mots, dans des expressions, dans la syntaxe. J'approu-ais naturellement sa démarche. Moi aussi j'étais du côté du progrès, de l'avenir.

Mais soudain la régente me stupéfia. Elle avait changé d'état d'esprit. Son gros nez en l'air, elle avait pris un air poétique. Elle parlait avec nostalgie. Pourtant, disait-elle, bien sûr le vieux temps avait du bon ! Toutes ces qualités qu'on n'a plus !

- Tu étais plus jeune mais tu dois te rappeler, Rita ? Le bon vieux temps ! Les gens se connaissaient tous, ils savaient d'où ils venaient. Ils s'entendaient, ils discutaient, ils s'entraidaient. C'étaient des vrais chrétiens. Ils ne pensaient pas qu'à l'argent, ils avaient des vrais mérites !

Comme une photo informe dont on s'aperçoit soudain qu'elle représente un panier de fruits ou un paysage photographié d'avion, l'inconséquence de sa position, qu'elle avait souvent exprimée en classe, me frappa brusquement, là devant l'église. Pourquoi alors, si le patois devait être extirpé par tous les moyens, la régente se mettait-elle à chanter les mérites du passé qui lui était lié ? Je me pose encore la question. Pourquoi, malgré sa nostalgie d'une société paysanne, Augustine travaillait-elle à en remplacer les valeurs par celles de la petite bourgeoisie, de l'ambition épicière et de la convention ?

Car le bon français qu'elle prônait, c'était une vision du monde médiocre exprimée dans une syntaxe simple. Le bon élève devait se méfier de la richesse et de la plasticité de la langue. Il lui fallait couler sa parole dans les lieux communs, les expressions toutes faites, les formules reconnues. Parler le bon français, c'était collectionner des locutions, des manières de dire réglées. S'en faire un fond solide. Les stocker dans une réserve où il suffisait ensuite de puiser pour permettre les échanges consensuels, convenables, qui n'entraîneraient ni contestation, ni débats, ni troubles.

La leçon de chose en un jour - page 229 -

22:15 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : arpitan, progrès, abondance |

20/06/2007

La Leçon -2-

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La leçon

de chose

en un jour. 

Alain Bagnoud

Edition L’Aire

Le héros principal et narrateur est ce petit garçon de sept ans qui arrive, ce jour là, dans le monde des grands mais qui sent bien qu’on ne va pas lui faire toute la palce et tout lui expliquer… pas tout de suite en tout cas. C’est un garçon rêveur, qui confond souvent ses songes et la réalité, qui se prend pour un grand footballeur, un preux chevalier… C’est le propre de l’enfance me direz-vous. Oui mais c’est encore plus l’enfance d’un écrivain.

A part ces rêves éveillés commun à tous les imaginatifs, l’écrivain se construit de plusieurs manières. La mienne est clairement dans la révolte contre un monde trop injuste, révolte sourde et inefficace mais néanmoins viscérale. La manière d’Alain, pardon de son héros, est bien plus modeste, presque effacé. Confronté à l’injustice, à la force, aux puissants, il se dit qu’ils doivent avoir raison, que c’est lui qui ne comprend pas. C’est le cas face au tout puissant Monsieur Richard Mitte de Lucien, l’homme qui a réussi, qui gagne de l’argent, conduit de belles voitures…

Et quand Augustine, la régente, féministe rétrograde (ça existe ?) frustrée de ne plus avoir sa classe de filles (ç’est bien plus sage les filles) essaye de l’humilier pour une faute qu’il n’a pas commise, il se dit que c’est peut-être de sa faute, qu’il doit faire preuve d’humilité devant un adulte. Encore que, plus tard dans la soirée, il aura le courage de rester quand la régente lui demande d’aller jouer pour parler seule à seule à sa mère.

Bien sûr, il y a la part de « littérature », la volonté de se mettre à la place de l’enfant fragile face aux puissances. Volonté de partager les croyances communes et les traditions, fussent-elles rétrogrades, xénophobes. N’empêche que c’est bien réussi puisque j’ai adhéré au respect de l’enfant pour ces fausses valeurs et que j’ai eu envie de lui dire « n’écoute pas, ce sont des balivernes, »

Alain nous décrit un monde disparu, la fin d’une époque de bondieuserie, de superstition mais aussi de solides valeurs morales. Quand je songe qu’il a neuf ans de moins que moi, c’est étonnant qu’il ait pu vivre ces choses. Je crois qu’il faut que j’y revienne... demain peut-être. Encore une fois, j'ai pris bien du plaisir à découvrir ce petit monde.

21:54 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (4) |

19/06/2007

La Leçon -1-

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La leçon

de chose

en un jour 

.

Alain Bagnoud

.

Edition L’Aire

.

Sur les blogs je rencontre des écrivains. Il arrive même que je les rencontre « pour de vrai. » Et bien sûr je suis amené à les lire ce qui est la moindre des choses me direz-vous. C’est ce qui m’est arrivé avec Alain. C’est tout neuf. Cela date du dernier salon du livre de Genève. Pas totalement étonnant quand on sait qu’Alain est prof à Genève.

Mais Alain est aussi Valaisan. Quand j’ai écrit « éclats et pulsations » je n’ai pas arrêté de répondre à la question : « Quelle est la part d’autobiographie ? » C’est la question que tout lecteur à envie de poser à Alain Bagnoud. Je réponds sans le consulter « une part énorme ! » Je ne sais pas trop pourquoi après tout car je le connais à peine. Et pourtant, il me semble ressembler comme deux gouttes d’eau à son jeune héros Aulagnard. Aulagne, Sinerre, des noms inventés mais dont il ne faut pas chercher bien loin l’équivalence.

Raconter son enfance serait, pour un écrivain, presque un exercice de style si, en fait, ce n’était aussi le fond de commerce de toute littérature. Les précédents sont innombrables, des autofictions plus ou moins transposées, l’Aulagne d’Alain est le Combray de Proust, le Macondo de Marquez…  Donc Alain fait dans le classique. Il fait aussi dans l’unité de temps et de lieu comme dans les pièces du Grand Siècle. 290 pages qui couvrent une seule journée, l’anniversaire de notre héros qu’il transforme en une seule leçon de chose.

Je ne me souviens pas où j’ai lu qu’il suffirait d’avoir vécu une seule journée pour pouvoir écrire de nombreux volumes. J’avoue que cette perspective m’avait laissé songeur. Je ne me sens pas trop capable de réussir cet exercice et j’avoue que, quand j’ai commencé le livre d’Alain et compris que tout se déroulerait réellement comme le dit son titre « en un jour », j’étais un peu inquiet. Et bien figurez-vous qu’il fait mieux que tenir la route. Avec ses personnages, Dogane le jeune étranger, pas de chez nous "les propres en ordre", donc à éviter, Milon un peu sorcier, le régent* et surtout Augustine la régente, sévère et bornée, le petit curé et surtout Monsieur Richard Mitte de Lucien, entrepreneur friqué et tout puissant que tous les gens du village semblent révérer, Alain Bagnoud nous captive. Je vous dirai un peu plus demain à quel point j’ai aimé ce roman. 

* Régent - Instituteur en Suisse et aussi dans la Savoie de mon enfance. Il faut reconnaître que cela donne une autre dimension qu’instit même renommé « professeur des écoles »

19:20 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Découverte, valais |

01/06/2007

Bible

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Encore

un petit billet

de

Jack Rollan

En date

du

9 mai 71

-

Bible

et

Traduction

:

"Il parait qu'il était nécessaire de mettre le Nouveau Testament en « français courant ». Un théologien de chez nous s'en est chargé. Et cet honorable journal a eu dimanche dernier la bonne idée de nous donner à comparer la Résurrection dans la version classique de Segond et dans la première de ce compilateur moderniste.

Version Segond* : Le premier jour de la semaine, elles se rendirent au sépulcre de grand matin, portant des aromates qu'elles avaient préparés...

Version 71 : Très tôt, le dimanche matin, les femmes se rendirent au tombeau, en apportant les huiles parfumées qu'elles avaient préparées...

Il était urgent en effet de faire savoir au monde que « de grand matin » voulait dire « très tôt » et que le sépulcre était un tombeau. De même était-il important de changer les aromates en huiles de chez Guerlain...
Mais puisqu'il s'agit de rendre les Evangiles plus « courants », moi, j'aurais carrément traduit :

... Le samedi soir après le turbin, les bonnes femmes conditionnèrent les lipides en sprays déodorants et, dès la fermeture des pubs, se pointèrent aux Pompes funèbres..."

______________-___________________________

*Louis Segond (1810-1885) est un théologien suisse qui a traduit la Bible en français à partir des textes originaux hébreux et grecs. La traduction de l'Ancien Testament a été publiée en 1871, suivie par le Nouveau Testament en 1880. Le texte a ensuite été revu par un comité d'experts. Le résultat de ces travaux est la version de 1910 qui est maintenant libre de droits et consultable sur Internet. D'autres éditions continuent à sortir, par exemple la dernière bible d'étude "La nouvelle Bible Segond".

Il s'agit d'une traduction de référence pour le français, d'une grande fidélité à l'original. Conformément à la doctrine protestante, elle exclut les livres deutérocanoniques. On a souvent comparé cette version à celle de Luther pour l'allemand et à la King James pour l'anglais. C'est la Bible la plus utilisée par les protestants francophones.

21:10 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (0) |

28/05/2007

Carré

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En tentant de remplir le questionnaire un peu simplet, trop carré, relayé par Jean-Louis Kuffer, je me suis souvenu que j'avais pro-grammé un algorithme de tri par la méthode quadratique, j’ai donc commencé par recher-cher cette méthode sur la toile et je me suis perdu dans les tri à bulles… Je reviens donc à la littérature...

Les quatre livres de mon enfance :

 Les albums de Mickey super géant dont mon parrain me gratifiait d’un exemplaire une ou deux fois par an. Je commençais par Grand loup et les Petits Cochons, puis Picsou, Donald, Géo Trouve-tout, et terminait par Mickey à travers les siècles.

medium_Akim.jpgAkim – Un succédané de Tarzan en BD. Mes copains préféraient Buck Jones et Kit Carson. Moi Akim et Tartine Mariol.

Tintin bien sûr. Que je lisais en colo à Crest-Voland, à l’heure de la sieste à la lumière tamisée des persiennes. Moment magique.

Le Chien des Baskerville, même colo, lu par le mono avant l’extinction des feux – Hou, ohou sur la landes… Bonne nuit… faites de beaux rêves.

Les quatre écrivains que je lirai et relirai encore :

 Au diable l’avarice :
Céline
Proust
Dostoïevski
Tchekhov

Les quatre auteurs que je ne lirai plus jamais :

 

Kim Il Sung (à dire vrai je ne l'ai pas vraiment lu)
Bill Packard
Milton Friedman
Mary Baker Eddy
 
Les quatre premiers livres de ma liste :


En direct de  ma pile :
-La leçon de chose en un jour Le livre d’Alain Bagnoud

Terre des oublis- Duong Thu Huong

A relire :
-Cent ans de Solitude
-Pereira prétend – avec tentative de lecture en italien

 

Les quatre livres emportés sur l’île déserte.


- De la philosophie sans doute – De Sénèque à Comte-Sponville en passant par des auteurs chinois – faut que je cherche avant d’embarquer.
- Un livre de maths assez complet un peu au-delà de mes capacités de compréhension mais pas trop avec tout tout sur les nombres premiers.
- A la recherche du temps perdu
- Et comme Jean-Louis, Le Dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey

 

Les derniers mots d'un de mes livres préférés :

L’excipit de Tristam Shandy, neuvième volume, chapitre XXXIII
- Doux J--s ! fit ma mère, qu’est ce que c’est que toute cette histoire ?
- Une CHAPONNADE en trop et un RATACONNICULADE en moins, fit Yorick ; l’histoire sans queue, mais non sans tête, d’un taureau flapi du bas, d’une vache qui n’avait pas eu d’andouille après souper, et d’une femme peut-être trop tôt vannée en sa grange _______ et une des meilleures que j’aie jamais entendues dans le genre.

 

Les quatre  lecteurs que je prie de mettre en ligne leurs réponses :

 

ThomasLe garde motstraces écrite - dvanw   

09:45 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (5) |

06/05/2007

Chick Litt

medium_people-or-not-people_c.jpgAprès le salon du livre de Genève de l’an dernier où l’on apprenait que le Saint-Esprit était une femme, il fallait que j’y retourne.

J’avais très envie de rencontrer Alain Bagnoud qui signait ses œuvres. On apprend des choses au salon. Connaissez-vous la chick litt ? Non ? C’est mon camarade de blog Alain qui la mentionne. C'est vrai que si on est pas prof de français, lolita ou encore parents de lolita, on a peu de chance de connaître. 

La chick litt (littérature pour les "poulettes"), c’est une étiquette mise sur la "littérature pour les filles", les Harlequins, Bridgett Jones et autres livres people, garçons, copines, premier baiser, maquillage... C’est un peu cucul mais distraisant (treize ans et demi maximum) mais, comme dit Myosotis, cette littérature ne remonte pas la pente pour les nanas sauf bien sûr si on prend en compte les lectures de leurs petits copains: l'Equipe, France Foot, et autres bouquins de cul.

A vous de juger: http://www.girlattitude.com/
http://blog.girlattitude.com/ ou encore ici

 

15:56 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (0) |

30/04/2007

Pessoa

medium_Pessoa.jpgDans une brasserie

de Lisbonne,

on peut voir

cette statue

de Fernando Pessoa

attablé en terasse.

On peut même s’asseoir à côté de lui, statufié dasn le bronze, sur un chaise de bronze, et on se rappelle soudain qu'il faudrait lire:

le livre de l'intranquilité.

Bernardo Soares, alias Fernando Pessoa, est intranquille. Il erre à travers des limbes infinies et tourmentés et pousse sa plainte lugubre d'un banni de l'existence. Au fil de ce journal intime, Pessoa inspecte l'intérieur aux mille facettes d'un de ses nombreux hétéronymes, c'est-à-dire d'une de ces "proliférations de soi-même" dont chacun de nous est construit. Ces pensées "décousues" dénotent une supra-conscience des êtres et de l'existence, le plus souvent douloureuse, presque insoutenable, mais qui suscite aussi curieusement, parfois, une douceur indicible, un bercement insondable au coeur de ce ciel où, déclare-t-il "je me constelle en cachette et où je possède mon infini".

Au contraire d'Alvaro de Campos, d'Alberto Caeiro ou de Ricardo Reis, autres hétéronymes de Pessoa, qui se réclament du paganisme, Bernardo Soares choisit de rêver sa vie…

01:16 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (3) |