Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

08/11/2006

Messie

medium_Jeando.jpg

Mais si... c'est...

La création du monde

par Jean

D’Ormesson

chez

Robert Laffont

-

Dieu a mis sept jours pour créer le monde, Jean d’O. n’en met qu’un de plus, un assez bel exploit. Pour cela, il convoque 4 amis qui se réunissent chaque année sur une île grecque. L’un deux a amené deux petits cahiers qui contiennent un texte fondateur : la rencontre de Simon Laquedem et de Dieu. Simon est le nouveau prophète, après Bouddha, Moïse ou Mahomet, que Dieu a choisi, signe des temps, pour son insignifiance de petit archiviste-paléographe un peu terne.

Cette divine révélation permet à Jean d’O de faire un petit bilan de l’histoire du monde et des connaissances essentielles de l’honnête homme du XXIième. Ce n’est pas trop pédant, l’histoire d’Alamut et des assassins par exemple qui vient un peu comme un cheveu sur la soupe (primitive comme il se doit) est très, trop connue. Non, ce n’est pas le style de Jean d’O d’écraser de sa culture.

L’académicien sautillant balaie simplement une quinzaine de milliard d’années racontées par un Dieu patelin et débonnaire qui peine parfois un peu à croire en lui-même. Un jour pour la naissance de l’univers, un autre pour le système solaire, un pour la vie, la vaste question du temps et de l’espace…  Tout y passe, le big-bang, les nombres, l’air, l’eau, la pensée… et puis bien sûr Dieu parle de l’homme, le seul sujet qui l’intéresse vraiment. Il avoue même que l’homme l’a épaté avec la théorie de la relativité et la physique quantique. L’homme va-t-il s’affranchir de lui ? Et pour tomber dans quelle turpitude ?

Les huit jours de vacances se terminent et Jean d’O nous offre une double chute, un double saut périlleux arrière. À son âge, 80 passés, il est resté drôlement agile notre immortel.  

17:55 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (3) |

02/10/2006

Le bizarre incident

medium_bizin.jpg.

The curious incident

of the dog

in the night-time

.

Ce récit est celui de Christopher, plus exactement de Christopher John Francis Boone, 15 ans, 3 mois et 2 jours, qui connaît «tous les pays du monde avec leurs capitales et tous les nombres premiers jusqu'à 7 507», qui aime les objets modernes, les horaires parce qu'ils permettent de «savoir quand les choses vont arriver», les mathématiques parce qu'elles sont faciles à comprendre, les chiens parce qu'ils ne vous adressent pas la parole de manière inopinée… il a un rat qui s'appelle Toby. Christopher déteste le jaune et le marron (surtout pour les aliments qui ne doivent pas se toucher dans l’assiette), parler à des inconnus, les histoires drôles et les métaphores parce qu'il ne les comprend pas et les romans (qui racontent des mensonges) à l’exception du chien des Baskerville à cause de la précision logique de Sherlock Holmes.


Christopher, sur les conseils de Siobban, sa professeur à l’école des ‘Besoins Spéciaux’ décide d’écrire un livre pour raconter son enquête sur l’assassinat de Wellington, le chien de la voisine découvert transpercé par une fourche. Il nous décrit donc par le menu (et avec un maximum d’acribie) son enquête avec quelques illustrations et ses intérêts pour les sciences exactes… Ce qui donne un petit livre passionnant par son style faussement naïf, écrit par un personnage incapable d’émotions, et où le lecteur est sans cesse partagé entre le rire et l’émotion. Le rire naît de l’aspect concasse des descriptions et relations très terre à terre des faits, l’émotion naît de la souffrance de Christopher pour qui traverser une gare bondée est bien plus difficile que de partir dans l’espace à bord d’un vaisseau de fortune.

Je ne vous en dis pas plus, on peut supposer que Christopher est un autiste avec un syndrome d’Asperger, un surdoué enfermé dans une logique compliquée, comme le personnage incarné par Dustin Hoffman dans Rainman. Ce livre n'est pas un livre sur l'autisme, c'est une réussite littéraire où le fond rejoint merveilleusement la forme. Si vous pouvez, lisez le en anglais (chez amazon.fr), ce n’est pas trop compliqué, peut-être du niveau d’Harry Potter, sinon la version française est là pour ça.


«Christopher n'est pas si différent de nous que cela, remarque l’auteur Mark Haddon. Je lui ai donné des habitudes, des attitudes et des façons de penser empruntées à des gens de mon entourage qui ne sont pas du tout anormaux! Je crois que nous avons tous en commun quelque chose avec tout autre être humain, aussi étrange soit-il.»


Vygolv me suggère de créer une rubrique de réflexion philosophique sur le langage. Il y a, selon moi, dans tous les grands romans un énorme travail sur le vocabulaire. The curious incident est un roman sur le langage et les vertus thérapeutiques de l’écriture. Bon, je ne sais plus ce que je voulais dire mais j’encourage vivement Vyglov a préciser sa pensée sur ce sujet… Voilà!

Au sujet des textes avec contraintes je cherche mais je ne crois pas que les gens vont contribuer à des choses difficles et rien de simple ne me vient à l'esprit... alors à votre bon coeur!

00:20 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (2) |

27/09/2006

Morphine

medium_LEOTARD2.JPG

J’ai la chance de posséder un CD (sans doute difficie à trouver) de

  

Morphine,

.

l’œuvre de

Boulgakov

.

dite par

Philippe Léotard

 

Dans ce court roman, Boulgakov raconte l’histoire d’un médecin rongé par la morphine. Boulgakov était médecin, avant d’être écrivain et journaliste, et il décrit avec réalisme et précision la dépendance que la voix de Léotard nous restitue à merveille.

 

Je n'en pouvais plus. Alors j'ai pris ma seringue et je me suis fait une piqûre.
Un soupir.
Encore un soupir.
Ça va mieux... Le revoilà, ce petit froid mentholé au creux de l'estomac...
Trois seringues à trois pour cent.
Cela me suffira jusqu'à minuit...

 

On peut aussi voir dans morphine une allégorie de l’ambiance pesante de la société soviétique à l’époque stalinienne dont on ne s’échappait pas mais ce n'est pas nécéssaire.  

00:00 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (4) |

26/09/2006

Coeur de chien

medium_bulgakov.jpg
[source]

Boulgakov - Cœur de chien

"Ouah-ou-ou-ou-ou-Ouah-ou-Ouah-ou ! Oh ! Jetez un oeil sur moi, je me meurs. Sous le porche, la tempête rugit la prière des agonisants, et je hurle avec elle. Je suis fichu, complètement fichu."

C’est un chien qui nous parle. C'est le pauvre chien Charik, un chien de gouttière maltraité, mal dans sa peau mais pas idiot (il sait lire le mot saucisson). Il est prêt à tout y compris suivre un inconnu en pelisse qui lui a semblé sympathique.

L’inconnu est rabatteur pour un professeur de médecine un peu brindezingue, Philip Philippovitch. Ce professeur a un projet pour Charik mais en attendant il est en train d’organiser la greffe des ovaires de guenon sur une patiente. Sur Charik, victime consentante, il va greffer l'hypophyse du cadavre d'un jeune bolchevik. A la demie surprise du professeur, Charik vas se métamorphoser en un petit ivrogne méchant et  héritant de tares du donneur tout en continuant de chasser les chats.
 
Comme dans le Maître et Marguerite, Boulgakov utilise l’absurde qu’il a créé pour se moquer des tares du système soviétique... Il ridiculise ces savants idéologues qui prétendaient créer un homme nouveau. Il s'en donne à coeur joie pour étriller aussi la bureaucratie étatique et les absurdités de la politique du logement communautaire de l'époque. C'est saignant et drôle !

Charik greffé dit : « Aucune liberté ne me fera partir d’ici… Je suis déjà habitué… J’ai un maître, je suis une créature intellectuelle, j’ai goûté au meilleur de la vie. Et puis la liberté qu’est ce que c’est ? De la fumée, une fiction… Le délire de ces dangereux démocrates…

Coeur de chien, traduction de Janine Lévy,

Kiosque Flammarion.

00:05 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (2) |

24/09/2006

Boulgakov

medium_Behe.jpg
Béhémoth

au pays

des

merveilles

.

L’œuvre la plus connue de Boulgakov, le Maître et Marguerite, conçue en 1928 et réécrite maintes fois, a été publiée en version censurée en 1966. La première version non censurée paraît à Francfort en 1969. En Russie, il faudra attendre 1973. Un parcours assez étonnant quand on sait le culte porté aujourd’hui à cette œuvre cheffe de Boulgakov.

Un des personnages les plus drôle de ce roman est un gros chat noir nommé Béhémoth, un des compagnons du diable, qui va semer dans Moscou plein de petites diableries très amusantes.

En parcourant le Web à la recherche d’informations sur un personnage célèbre, on se demande parfois comment on a pu retrouver de tels détails de l’époque obscure du personnage. En lisant la bio très détaillée de Boulgakov sur Wiki, je tombe sur le texte ci-dessous qui explique comment cela se passait en Russie communiste.

"…le 28 février 1929, Boulgakov rencontre d'Elena Chilovskaïa, c’est le coup de foudre… Elle sera sa troisième épouse et le modèle de Marguerite dans Le Maître et Marguerite. Le même jour, l'Oguépéou (la police politique) enregistre une information selon laquelle Boulgakov aurait entrepris un nouveau roman. Il s'agit d'un « roman sur le diable », conçu en 1928, et dont Boulgakov a commencé la rédaction au début de l'année.

Attention, big brother is watching you.

A part ça, un message pour Xav et les amateurs d’opéra, allez faire un tour sur ce blog

Même si vous n’aimez pas l’opéra allez quand même écouter et voir cette prouesse de Natalie Dessay.

10:30 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (5) |

22/06/2006

Relire

medium_MaC.jpgRelire

Mort à Crédit

de

Louis-Ferdinand Céline

Il y a des quantités de livres que je voudrais relire. L’ennui c’est que je n’arrive déjà pas à lire tout ce que je voudrais lire. Je dois dire que depuis que je connais le blog de Jean-Louis Kuffer, les choses n’ont fait qu’empirer.

Pendant longtemps, j’ai voulu relire le Voyage. Je l’avais lu quand j’avais 18 ans… difficile de décrire la secousse… Ceux qui l’on aimé s’en souviennent… Alors j’avais enchaîné : D’un château l’autre… pas du tout pareil ; Mort à Crédit… déjà mieux mais pas le choc. Pour relire le Voyage, j’ai acheté l’édition illustrée par Tardi, puis celle de la Pléiade. Bonne idée sauf que… je n’aime pas lire les beaux livres*.

Au grenier, sur les étagères des livres moches, j’ai retrouvé Mort à Crédit dans la vieille édition de poche avec la tranche orange un peu passée, 629 pages, écrit tout petit, une odeur de poussière… Sans doute le livre lu il y a trente ans… Je l’ai ramené doucement à la vie. Il s’est mis à traîner sur tous les coins de tables, le canapé, les tablettes de lavabo… il s’est rempli de cornes marque-pages. Je me suis mis à le distiller, mot à mot, page à page avec retour en arrière, marque au stylo, points d’exclamation simples, doubles, triples comme sur un manuel de jeu d’échec.

J’en ai lu des paragraphes à ma femme avec les airs inspirés de Fabrice Lucchini : « Je commençais à bien me rendre compte, qu'elle me trouverait toujours ma mère, un enfant dépourvu d'entrailles, un monstre égoïste, capricieux, une petite brute écervelée... Ils auraient beau tenter... beau faire, c'était vraiment sans recours... Sur mes funestes dispositions, incarnées, incorrigibles, rien à chiquer... Elle se rendait à l'évidence que mon père avait bien raison... D'ailleurs pendant mon absence, ils s'étaient encore racornis dans leur bougonnage... Ils étaient si préoccupés qu'ils avaient mes pas en horreur! Chaque fois que je montais l'escalier, mon père faisait des grimaces. »

En lisant Mort à Crédit, c’est l’enfance de Ferdinand qui défile, et sans faire de psychanalyse à deux balles, on comprend pourquoi il est devenu ce personnage qui haïssait l’humanité, torturé par ses démons… et en même temps ce médecin à Meudon qui ne faisait pas payer les pauvres.

Si vous ne l’avez pas lu lisez-le, sinon relisez-le.

* L'édition de Céline illustrée par Tardi fait exception

11:35 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (2) |

18/06/2006

Le harem en péril

medium_rafik.JPGLe harem

en péril

.

Rafik

Ben Salah

.

 

"Si (en Suisse) les gens connus font tout pour passer inaperçus, pourquoi des inconnus voudraient-ils passer aperçus ?" Cette phrase est extraite d’un entretien donné par Rafik Ben Salah à Culturactif que je vous conseille de lire.


Pour ma part, je viens de lire le Harem en Péril un recueil de 10 nouvelles qui se passent toutes au Magreb. Ce livre est un petit bijou. Que dissimule le ventre de Selma, fille d'Aïcha ? Le docteur Nawas fricote-t-il avec nos femmes dans son cabinet ? Ouarda la bonne ne serait-elle pas une folle dangereuse ? Et si Khlifa était homosexuel ? Un chameau se suicide... Ces destins nous font découvrir un monde que l’on connaît un peu mais dont on ne réalise pas toujours à quel point il est différent, gouverné par d’autres règles et par l’ignorance, à quel point là-bas plus qu’ailleurs traditions et modernité déchirent, écartèle hommes et société.

Chaque nouvelle est un petit drame superbement raconté dans une langue inventive et d’une immense richesse, une langue un peu épique mélange de conteur et de lettré. L’humour sous-tend des récits très durs, très intenses. Le plaisir des mots est toujours là, un peu savant sans être cuistre. On se sent impliqué, on vit l’histoire, même Allah est pris sans cesse à témoin. On a de la tendresse pour ces personnages écrasés par le poids de la société et l’envie de vivre comme des roumis.

15:20 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (0) |