07/08/2005
Internet Romance -14-
Tom, encore Tom. En toute indiscrétion, entre les lignes, je sentais bien que l’Italien sportif, inculte, un peu fruste, était pour Mary-Ann plus qu’une simple liaison. Elle s’était attachée à ses trois enfants : « Le dimanche, quand les enfants de Tom sont avec nous, on se lève de bonne heure, on fait très beaucoup de choses actives. Ils sont gentilles avec moi. Le problem c’est qu’ils ne sont pas miens et ils sont des teenagers. » Les autres dimanches, il prenaient du bon temps : « …quand les enfants sont avec leur maman, Tom et moi, on ne quitte pas le lit avant que d’aller à le match de soccer vers trois heures après-midi. On prépare des plateaux… On se recouche… Je crois qu’on dit c’est une grasse matinée… c’est very délicious » A la lecture de ces mots Nico devait trouvé le sportif bien encombrant.
Dans un des courriels que je lisais en douce, elle annonçait à grands cris sa venue en France, ce serait en septembre. Je n’ai pas eu à jouer les hypocrites bien longtemps, Nicolas est arrivé triomphant dans mon bureau « Elle va venir ! Elle arrive bientôt ! C’est merveilleux ! Il faut que je prépare tout ça. Je serai en vacances en septembre et en octobre, six ou sept semaines, je crois. » Je n’ai pas eu le cœur de lui faire remarquer que l’on ne pouvait pas prendre plus de quatre semaines de congé d’affilée sans une excellente justification. À dire vrai, cette histoire commençais à tous nous fatiguer : Nicolas, moi et surtout toute l’équipe de prima donna. Dans les couloirs, à la cafétéria, on ne parlait plus que de ça. Le travail de tous s’en ressentait. Une pause de deux mois nous ferait le plus grand bien à tous.
De plus, nous allions faire la connaissance de Mary-Ann, de la pétillante Mary-Ann. La plus belle fille de TKN Sydney. Elle aussi était tout excitée :
Sydney le 12-Sep
Nicolas,
J'ai trouvé un billet d'avion vraiment pas dispendieux (expensive?). Dans 3 semaines et 1 jour c’est pour moi la France! Je m’enjouis très beaucoup de notre rencontre en vrai. Tom ne parle rien sur ces vacances. Rien de plus sur le mariage. Le projet du début de l’année, projet qui devrait être achevé ce mois-ci. Je ne sais quoi faire plus. Je vais prier Dieu pour inspirer mes choix.
Ma curiosité n’avait plus de frein. Au début, je n’osais pas trop aller guigner dans le courrier de Nicolas Ce n’était pas digne de moi. Puis progressivement, j’ai fouillé dans tous ses fichiers. Ce mariage, prévu de longue date, entre Tom et sa belle, il me l’avait caché. C’est Mary-Ann qui l’avait annulé en mai ou en juin. Nicolas m’avait dissimulé d’autres petits secrets qu’il confiait à une sorte de journal bizarre tenu dans un fichier EXCEL.
A cause de ce rôle d’espion, quand Nicolas m’a demandé de venir accueillir Mary-Ann à Lyon, j’ai un peu hésité. J’étais partagé entre ma curiosité à vif et une envie de sortir de ce rôle de témoin sournois, de voyeur un peu glauque. J’ai accepté bien sûr. Nicolas comptait les jours comme un prisonnier. Il était soudain pris d’une fièvre d’écriture dans French. Sa grande inquiétude, c’était la photo de sa belle qui n’arrivait pas, une coquetterie de sa part. Nous, les french-noteurs grenoblois, il y avait belle lurette que Nicolas nous avait demandé, à tous, des portraits pour les envoyer à Sydney. J’avais posé dans un photomaton avec mon casque de moto et mon air le plus niais possible. Nicolas avait sous-titré : « Mon chef casqué. »
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06/08/2005
Internet Romance -R2-
A travers French, Nicolas et Mary-Ann communient dans leur amour de la musique. La plus belle fille de TKN Sydney semble s’intéresser à Nicolas. Au Trianon, le bar du coin, les confidences vont bon train entre Nico et le narrateur. Il raconte son enfance. Gosse malingre, il a remplacé les séances de gymnastique par des séances d’harmonium et des révisions intenses. Il réussi bien dans ses études. Dernier de la couvée, il est le petit chouchou des ses parents à qui il rend visite en Vendée chaque mois en traversant la France dans sa petite R5.
Il raconte aussi ses amours qui réussissent moins bien. Nicolas était fait pour vivre au moyen-âge. Il aurait mis des années à conquérir sa Dulcinée, à faire la cours à Béatrice ou à Laure. Au lieu de cela, Mireille, plus pressée, lui préfère son meilleur ami avant de jouer les entremetteuses pour se faire pardonner.
Mais il n’a a pas que par Nico et French que le narrateur se renseigne. Il est un peu fouineur semble t’il. Il fouille les fichiers sur la machine de Nico, il lit ses mails. C’est pas joli-joli mais il découvre entre les lignes que Nico n’est pas seul dans le cœur de Mary-Ann. Un certain Tom...
Il apprend aussi que la belle soigne discrètement l’alcoolisme latent de tonton Nico.
Nicolas, lui ne semble pas avoir cure de Tom, il écoute Mary-Ann qui lui joue des morceaux par téléphone au milieu de la nuit.
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05/08/2005
Internet Romance -13-
Tom, le gros souci de Nicolas. Le très cher Tom... Mary-Ann et Tom… Nicolas n’en parlait que par allusion. Pour Nico, c’était zone sensible, terrain miné. Il s’appelait de son vrai nom Gian-Luigi. C’est presque tout ce que j’en ai su par Nicolas C’est peut-être pour ça que je me suis laissé aller à l’indiscrétion. Non, je ne veux pas chercher d’excuses, je n’ai aucune excuse, à peine celle du hasard et encore… La curiosité ? La curiosité n’est pas une excuse. J’ai honte, tout simplement.
J’ai toujours refusé d’avoir des privilèges sur les ordinateurs et sur le réseau. Bien que responsable, je veux rester un utilisateur lambda : Ni droits, ni devoirs. J’aurais dû me tenir fermement à ce sain principe. A l’époque, j’ai dû faire une exception pour un problème bien trop long à expliquer ici. La première fois que j’ai accédé au mail de Nicolas, ce fut, je le jure, par le plus grand des hasards. Le fait que je sois tombé sur un message de Mary-Ann a, bien sûr, aiguisé ma curiosité. Je n’ai pas pu m’empêcher de lire le premier, puis, j’en ai lu un autre, puis une réponse de Nico. Voilà comment de fichier en fichier, je suis devenu un voyeur.
De mes farfouilles, il en ressortait que : fin juin ils échangeaient des banalités musicales, en août ils frisaient les déclarations d'amours éternelles. Tout cela concordait bien avec le récit de Nicolas Même son rapport avec l’alcool.
De : YSATIS::nicolas.larue
A : mary-ann.nelson
« (…) Je bois un peu trop. Depuis l’an dernier, je me suis mis à boire un ou deux whiskys le soir, seul. Quand je rentre du travail, je me sers une rasade. Parfois cela vient après les deux ou trois bières bues avec les collègues au Trianon, le bar populaire dont je t’ai parlé. »
From: maryann.nelson
Cher Nico
« Tu dois faire attention à toi. L’alcool est un real poison… C’est crime contre la vie que Dieu a donné à nous. »
De : YSATIS::nicolas.larue
A : mary-ann.nelson
« (…)Je suis content de ma décision pour l’alcool. C’est fini. Terminé, depuis dimanche soir, le 2 août à deux heures trente précises, quand je t’ai téléphoné. J’ai suivi ta recette à la lettre. J’ai pris une bouteille pas encore entamée (pas ouverte, c’était du Pastis). J’ai fait une petite prière… Depuis, je n’en ai plus touché une goutte. Les copains se moquent gentiment de moi. Je ne m’en soucie pas. Je t’aime de plus en plus… » Nicolas
C’était vrai. Il avait cessé. Au Trianon, depuis ce jour, Nicolas ne commandait que du thé et du coca. J’ai d’autant plus honte de mon espionnage qu’il me racontait tout, sauf pour Tom. Plus tard, il se laisserait aller à affirmer que la liaison de Tom et Mary-Ann était quantité négligeable, il disait « quantité epsilon. » Il ajoutait : « C’est un accouplement contre nature. Ce mec, c’est un latin, un sportif, une bête inculte un rustique. Tu l’imagines ? Avec ma belle musicienne, cultivée, sensible, spirituelle, religieuse. Tu comprends ça ? Non, ce n’est pas possible ! »
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Magique Rokia
- Elle est malienne.
- Elle est magique.
- Elle est maligne.
- Elle est musique.
- Elle est magicienne
- Elle est musicienne.
- Elle est belle
- Elle chante en bamanan
- C'est sa langue maternelle.
- La langue des Bambara,
- Des Malinké d’Afrique de l’ouest.
- Elle danse en africaine.
- Elle est LA danse africaine.
- Elle est la danse tout court
- avec ses long bras souples et musclés qui ondulent en harmonie et en rythme parfaits.
- Elle chante
- Elle varie le rythme
- Elle varie les mots
- Elle chante la jeunesse, la danse, la santé, la vie.
A trente ans elle affiche une sérénité et une sagesse que l’on souhaite à beaucoup de vieillards, que surtout l’on se souhaite à soit même. Elle dit :
« Je voulais retrouver l’état d’esprit qui était le mien avant de me lancer dans une carrière professionnelle : l’humilité, la tolérance et la simplicité, des valeurs fondamentales dans mon travail. Je voulais rester simple, intègre, et garder la tête froide. »
Des chansons d’amour sur la fragilité des relations humaines, des textes qui posent des questions et cherchent des réponses à nos inquiétudes, l’enfance dans « Bowmboï » et « Manian ». « Je veux chanter cette période déterminante dans la vie des êtres humains. Il n’y a pas dans la réalité de droit universel de l’enfant, pas de points de départ égaux à toute vie humaine. » La femme, la vie des femmes.
Elle s’appelle Rokia Traoré.
- Si elle passe près de chez vous, n'hésitez pas, allez la voir.
- Vous passerez une soirée magnifique
- A bouger
- Ou à chanter
- Ou à rêver
- Ou à méditer
- Ou encore tout cela en même temps.
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04/08/2005
Internet Romance -12-
- Quelle chance incroyable j’ai eu de tomber sur une musicienne comme elle ! Elle parle si bien de Beethoven… Elle me raconte Chopin… Elle explique l'apparente simplicité de Mozart. J’aime. J’adore. Tu te rends compte, Mozart. La simplicité de Mozart… avec son accent et ses commentaires si savoureux !
Savoureux, oui, je confirme en relisant mes archives de French. Voici trois courts extraits, en respectant l’orthographe originale de Mary-Ann :
Nicolas et moi avons agrée tout les deux de pratiquer en parallèle la Toccata et la Fugue de Bach, BMV565, j'ai la toccata assez bien mais la fugue m'évite complètement pour l'instant.
(…)
A part Debussy, qui sera mon prochain compositeur si je conquéris (sic) Chopin, je ne suis pas très anamorée de personne au XXieme siècle. J'avoue ne pas tellement (aimer ?) Malher, c'est la musique pour se couper la gorge avec.
(…)
Je viens de découvrir GOREÇKI, sa symphonie des chants douloureux. Je ne savais pas qu'il est toujours avec nous. Si triste, si obsédant, c'est de la musique vraiment belle, je vais m'acheter la CD."
Toujours au Trianon, nous parlions des french-noteurs. Dieter de Munich qui ne ratait pas une fête ou un anniversaire. Dieter qui, avec une histoire minuscule, savait créer de long suspens qui irritaient Antoine. Antoine, l’écologiste de service, qui vivait à Sophia Antipolis, près de Nice et qui recyclait tout, un maniaque. Les compères québécois : Josselin et Jean-Jacques, des indépendantistes convaincus qui cultivaient un humour américain. Patrick de Bruxelles, le pacifiste qui prévoyait la guerre en Bosnie, en Croatie. Julia la chanteuse de Boston. Toinette la prolifique, réponse à tout, féministe, expansive, amusante. Nicolas avait tout lu des échanges enflammés du passé. Échanges dans lesquels, il était question de l’avenir de TKN, de l’Europe, des hommes et des femmes…
Fâchés pour un mot trop haut, certains french-noteurs avaient quitté la scène avec perte et fracas, détruisant leurs propres contributions. Le champ de bataille était jonché de cadavres. Il fallait patience et imagination à l’historien curieux pour refaire la bataille. Les fâchés belliqueux étaient-ils restés en coulisse ? Combien y avait-il de lecteurs sournoisement planqués, qui jamais n’écrivaient une ligne ? Impossible de le savoir. Nous ne pouvions que supputer.
Mary-Ann, l’extravertie, ne cachait pas son jeu. Elle annonçait la couleur : en avril, avant même que l’idylle avec Nicolas ne se noue, on a tout su d’elle :
De ma part, je n'ai pas encore ma propre famille, mais j'en ai une pour pratiquer sur. C'est celle de mon très cher ami Tom. Divorcé depuis trois années. La femme de Tom est partie pour deux semaines, sans lui avertir. Donc samedi et dimanche je me suis occupé de les trois enfants, c'est difficile..."
23:45 Publié dans Internet Romance | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Littérature |
03/08/2005
Internet Romance -11-
Novembre à Boston, chez Julia, janvier en Australie, en mars Nicolas ouvrait sa note « En avant la musique ». C’est là qu’avaient commencé les échanges avec Mary-Ann dans French. En mai et en juin, la passion exhibitionniste montait, montait... Pendant l’été, l’échange se fit moins public. C’étaient les e-mails, les courriels comme dit Nicolas, très puriste, défenseur de la langue française. Courriels qui transportaient les mots doux à la vitesse des électrons, en toute discrétion. Pendant l’été, je me suis retrouvé célibataire, ma femme est partie à Londres pendant l’été. Les enfants étaient chez leurs grands-parents, je les avais le week-end. Après un longue journée de travail, je pouvais m’adonner en toute sérénité à un de mes vices favoris : la bière du soir, après le travail, au Trianon, le bar proche de TKN.
C’est ainsi que j’ai partagé les secrets de Nicolas, mais, j’ose à peine l’avouer, ces conversations, ne furent pas ma seule source de renseignements. J’en suis d’autant plus confus que, sur la terrasse ensoleillée du Trianon, Nicolas commençait à se confier à moi à cœur ouvert. Il me disait ses secrets intimes en toute innocence. Je jouais les confidents le soir et je l’espionnais la journée. Je ne suis pas fier de moi, ma seule excuse n’est pas très solide : c’était plus fort que moi. J’étais sincère quand j’essayais de lui faire prendre de la distance par rapport à Mary-Ann. Je lui expliquais qu’il lui fallait se montrer moins empressé… c’était peine perdue. Au pèlerin déshydraté, toute eau est bonne à boire.
Il me parlait de ses parents. De ses vieux parents, restés en Vendée, à qui il rendait visite toutes les quatre semaines dans sa bonne vieille R5. « Elle ne craint ni la neige ni le verglas. Je compte bien l'amener au-delà des trois cent quatre-vingts mille kilomètres… » Pas besoin de questionner. « Oui… la distance de la terre à la lune. » Cette voiture inusable, c’était sa fierté. Il ne fallait surtout pas critiquer les produits français en sa présence, les voitures Renault moins que tout autre. L’hiver, il y allait en avion. Il parlait souvent de sa mère, moins de son père :
« J'aime bien passer le week-end avec eux. Malgré mes quarante ans je reste leur enfant chéri. Tu comprends, je suis le petit dernier. Le vilain petit canard, maigrichon, un peu fou et amusant. Ma mère est aux petits soins, elle me concocte mes petits plats favoris. Je lui apporte un livre ou deux, elle adore lire. Avec le père, on discute politique. C’est surtout pour lui faire plaisir, pour moi, la politique ça ne vaut pas un petit concerto ou un bon vieux problème de math. » Pour son voyage à Boston, il leur avait raconté qu’il partait en voyage d’affaires. Il parlait de lui un petit peu et sans cesse il revenait sur elle…
19:40 Publié dans Internet Romance | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Ecriture |
Chinois
Il y a deux an, je saluais le voyageur indien aujourd'hui,
19:40 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) |