21/11/2010
Vergogne
Honte
Vergogne
Déshonneur
Ignominie
Ma grand-tante Joséphine ne parlait pas de honte mais de vergogne. C’était, je pense, un terme qu’elle puisait dans sa langue maternelle le patois savoyard, l’arpitan comme on dit aujourd’hui. En français le mot n’existe plus que dans l’expression « sans vergogne » Autrefois, vergogne signifiait honte avec une connotation sexuelle liée à la nécessaire pudeur exigée par la religion. Un sentiment lié à l’honneur.
La Vergogne a donc disparu, mais qu’en est-il de la Honte ?
Klaus Scherer, professeur de psychologie à l’uni de Genève, pense que la honte disparaît aussi dans nos sociétés occidentales individualistes. Il en prend pour preuve l’avant dernière place de la honte parmi une trentaine de sentiments ou émotions éprouvés par un suisse dans une journée (en vrac ci-dessous).
Lire sur Letemps.ch le débat avec Boris Cyrulnic qui vient de sortir un livre sur la Honte. : « Mourir de dire »
Trouvée ici (chez René Merle), cette petite phrase qu’aurait pu prononcer ma grand-tante :
“Sare-ti pas na vergogne dian na petita familla comme no sen orandrai que no sen tô frares, s’on ne povai pas s’entendre sans fare tan d’escandale é de déspense ?” * (voir à la fin de la note)
Que je traduit trahis librement par : « Ne serait-ce pas une honte dans une petite famille comme la nôtre si, entre frères, on ne pouvait pas s’entendre sans faire de scandale et de dépenses. » J’avoue que l’aspect dépense, ici liée à la honte en toute savoyardise, me ravit .
"Dialogue sur l’Assemblée Nationale, entre Jaquet & Jean-Marc". Cet auteur, anonyme, est Charles Pictet de Rochemont, notable genevois. Pictet de Rochemont est sinon le plus célèbre des genevois au moins celui à qui Genève doit le plus. Il a oeuvré pour l'agrandissement de Genève et son rattachement à la confédération après la chute de Napoléon. Il fut un diplomate remarquable aux congrès de Paris en 1814, Vienne en 1815 et Turin en 1816. Il avait déjà quitté le vie publique pour sa ferme de Lancy quand son ami le syndic Lullin vint le supplier "Charles abandonne tes champs et tes moutons, Genève a besoin de toi pour un nouveau destin". Son travail de diplomate terminé, Charles retourna à ses moutons. Il avait une passion pour la race Mérinos (source Genève Insolite - Christian Vellas).
Photo: Statue sur la place de la Treille à Genève.
10:33 Publié dans Au fil de la toile, Mots | Lien permanent | Commentaires (5) |
17/11/2010
Adresse
Zut, la vidéo de Michel Serres donnant une conférence à l’école polytechnique a disparu de DailyMotion.
Il y était question de l'exo-darwinisme. C’est un concept déjà vu en 2006 chez Dvanw qui dit que l’apport de la technologie est une sorte d’évolution propre à l’homme et extérieure à lui. Un darwinisme non génétique donc. Les outils de l’artisan remplacent la main, le coureur de 100 mètres appareillé va presque aussi vite que les champions, le papier puis l'imprimerie remplacent la mémoire, effet démultiplié par Google... L’ordinateur supplée nos défaillance cognitives et libèrent notre cerveau. On peut même se demander si l’ordinateur n’a pas déjà remplacé complètement le raisonnement chez certains internautes (c’est moi qui ajoute)…
C’est un peu ce que Bernard Stiegler explique par la prise en compte de la « techné » aux limites d’une réflexion philosophique résumée par :
« L'homme est cet accident d'automobilité que provoque une panne d'essence ».
Selon Ziegler (que j'ultra simplifie), la technicité est la nature de l’homme. L'homme est ce vivant qui n'a de qualités que dans un ajout originaire d'artificialité. Son essence est faite d'artéfacts.
Michel Serres est plus abordable. C'est un formidable passeur de connaissances. Il adore les mots et il aime bien revenir à l’étymologie. Il fait un show sur le mot adresse en passant par l’orthographe anglaise « addresse ». Ad-Rex (message adressé au roi). Selon Alain Rey, le verbe adresser a le même sens que dresser, faire tenir droit (lat directum puis direction) qui devient diriger ou aller vers. Les deux sens modernes de habileté et de indication/emplacement arrivent au XVIième siècle. Le mot anglais (au roi) nous revient à la révolution et Mirabeau. Le sens informatique nous revient aussi de l’anglais par le vocabulaire informatique. Au départ c’est une place en mémoire puis un nom d’ordinateur ou une adresse IP (Internet Protocole), une URL (Universal Resource Locator), un courriel...
Indépendamment de l’étymologie, Serres s’intéresse au sens du mot dans sa vision exo-darwiniste. Le mot est passé d’un repère cartésien (angles droits) à une adresse courriel ou un numéro de portable (t’es où ? T'as du réseau ?) et ce que cela implique pour la société de son droit. Le portable peut être partout encore qu’il faille faire attention car la police peut facilement vous retrouver en X-Y et même suivre votre parcours. Eh oui, la techné n’est ni bonne ni mauvaise. Pour l’éthique, prière de se reporter à la rubrique philosophie.
12:14 Publié dans Au fil de la toile, Mots | Lien permanent | Commentaires (3) |
14/11/2010
Une photo
Au premier plan la Pointe Percée, à sa droite le col des Vert avant la petite pointe (des Verts). Derrière enneigé, de gauche à droite: Aiguille du Midi, Mont-Blanc du Tacul, Mont Maudit et Mont Blanc.
Entre les deux plans à gauche de la Pointe Percée, l'aiguille du Gouter sur la voie "normale" du Mont-Blanc avec à son sommet l'ancien refuge :
Le futur en construction à droite de l'arête:
20:06 Publié dans Montagne | Lien permanent | Commentaires (0) |
12/11/2010
Langue de bois
Un exercice fascinant auquel se livre sur scène Franck Lepage consiste à choisir quelques mots clé (dits concepts opérationnels) qu’il écrit sur une fiche. Il brasse les fiches et prononce un discours langue de bois criant de vérité mais forcément creux.
Je me suis amusé à refaire l’exercice avec le premier texte trouvé sur le site de l’ACSé en isolant 10 mots ou expressions. (L’Acsé est placée sous la tutelle d'Eric Woerth, Ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique et de Fadela Amara, secrétaire d’Etat en charge de la ville.) Saurez-vous retrouver le texte original parmi mes 5 faux ?
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Il faut recréer des relations de proximité en bannissant l’exclusion et la violence dans le but d’améliorer la confiance du citoyen et la tranquillité publique. C’est le rôle d’une véritable politique de la ville qui veut entraîner une amélioration du lien social dans toutes ses composantes. Ce qui veut dire construire les champs social et culturel, dans les domaines nécessaires à la formation, l’emploi, la santé, etc… Pour cela, il faut mettre en place des outils tels que la médiation sociale.
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Les quartiers dans lesquels la politique de la ville a sa place sont ceux qui souffrent le plus d’une attrition des emplois ainsi que de ses conséquences : la violence et l’exclusion. Pour restaurer la tranquillité publique, c’est ici qu’il nous paraît nécessaire de mettre en place une forte médiation sociale dans le cadre de relations de proximité. Pour réussir, c’est l’ensemble des champs sociaux et culturels qui sont à prendre en compte. C’est à ce prix que l’on pourra recréer du lien social et prétendre à la tranquillité publique.
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La dégradation du lien social, l’augmentation de l’exclusion et de la violence, s’expriment avec une acuité particulière dans les quartiers de la politique de la ville, où la nécessité d’une relation de proximité fondée sur la confiance conduit à conforter, développer et encadrer les fonctions de médiation sociale, en rapport avec les champs social et culturel, l’école, la santé publique, les services publics, l'emploi et dans les domaines de la tranquillité publique.
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L’engagement de proximité, la lutte contre l’exclusion et la violence, la bataille de l’emploi sont les clés d’une politique de la ville réussie. Il faut s’attaquer à tous les champs sociaux et culturels (formation, santé, services publics…) en même temps dans le but de retrouver la tranquillité publique dans les quartiers difficiles. Des agents de médiation seront en charge de recréer de la confiance et du lien social dans des espaces pacifiés…
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Il nous faut assurer la bataille de l’emploi et la lutte contre l’exclusion en relation avec tous les champs sociaux et culturels, école, santé, services publics. Forgeons dans les quartiers choisis des outils de médiation qui assureront une plus grande tranquillité publique. Les actions de proximité dans le but de créer du lien social sur la base de la confiance sont nos meilleurs atouts contre la violence. C’est à ce prix que pourra se mettre en place une bonne politique de la ville.
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C’est par la médiation, une plus grande transversalité et la confiance dans un travail de proximité que nous pourrons stopper la destruction du lien social et de l’emploi dans les quartiers concernés par la politique de la ville. Des quartiers aujourd’hui confrontés à l’exclusion, à la violence et à la dégradation de la tranquillité publique dans tous les domaines du champ social et culturel.
Facile, non ? Pas de triche google svp.
02:52 Publié dans Humour, Textes | Lien permanent | Commentaires (2) |
11/11/2010
Mémoire
00:33 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) |
09/11/2010
La chair
La racine indo-europèenne (S)KER à donné en grec le mot sarx sarkos et en latin caro, carnis. Les dérivés sont chair, carne, carné, charnu, charnel, carnassier, carnation, incarnat, carnage, acharner, décharner, écharner et même charcutier et charcutaille.
On peut aussi noter sarcophage (qui mange/consume les chairs).
Ainsi qu’un pléonasme sur pattes la mouche à viande sarcophaga carnaria. Selon Wikipédia, Sarcophaga carnaria est une espèce sinanthrope(?), créophage (qui mange de la chair),nécrophage (qui mange des cadavres), coprophage (qui mange des excréments) et probablement myiasigène accidentale (dont la larve se développe parfois sur des tissus vivants). On utilise sa nécrophagie en médecine légale pour dater la mort. Charmante bébête.
10:20 Publié dans Mots | Lien permanent | Commentaires (1) |
07/11/2010
Louis Lavelle
On reproche souvent à ce blog son abscondité et son abstrusion. On a raison. C’est fait exprès. Je voulais vous faire part de la conférence gesticulée donnée par Franck Lepage à Genève. Je cherche un peu mes mots, ce sera pour plus tard. Sans rapport, j’ai trouvé un philosophe de l’être.
Louis Lavelle, philosophe français (1883-1951) est l'un des métaphysiciens majeurs du XX siècle. Avant de poser un petit texte très Lavellien, une question et deux définitions :
« Qu'est-ce que l'être ? » Question ontologique s’il en est. L'histoire de la métaphysique n'est que l'histoire de l'oubli de la question de l'être. La question de l'être est tombée dans l'oubli, et l'on a oublié cet oubli même.
En philosophie, l'ontologie (du grec ὄν, ὄντος, forme neutre du participe présent du verbe être) est l'étude de l'être en tant qu'être, c'est-à-dire l'étude des propriétés générales de tout ce qui est.
La méréologie est une branche de l’ontologie formelle. C’est une collection de systèmes axiomatiques qui traitent des relations entre la partie et le tout.
Le texte :
« L’existence [l’être] s’applique immédiatement à la totalité du monde, mais elle ne s’appliquent à ses parties que grâce à l’analyse qui les distingue les unes des autres et détermine avec une extrême rigueur leurs limites mutuelles. L’unité de la pensée se manifestera par la simplicité de l’acte caractéristique de l’analyse ; mais en s’appliquant à la totalité de l’être concret donné primitivement cet acte simple témoignera d’une inépuisable fécondité : il engendrera la variété de toutes les formes particulières de l’existence. Dans l’identité agissante par laquelle la pensée distingue un terme quelconque de tout autre se trouve exprimée en quelque sorte éminemment la diversité de toutes les distinctions réalisée ».
17:39 Publié dans Au fil de la toile, Questions essentielles | Lien permanent | Commentaires (0) |