19/06/2007
La Leçon -1-
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La leçon
de chose
en un jour
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Alain Bagnoud
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Edition L’Aire
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Sur les blogs je rencontre des écrivains. Il arrive même que je les rencontre « pour de vrai. » Et bien sûr je suis amené à les lire ce qui est la moindre des choses me direz-vous. C’est ce qui m’est arrivé avec Alain. C’est tout neuf. Cela date du dernier salon du livre de Genève. Pas totalement étonnant quand on sait qu’Alain est prof à Genève.
Mais Alain est aussi Valaisan. Quand j’ai écrit « éclats et pulsations » je n’ai pas arrêté de répondre à la question : « Quelle est la part d’autobiographie ? » C’est la question que tout lecteur à envie de poser à Alain Bagnoud. Je réponds sans le consulter « une part énorme ! » Je ne sais pas trop pourquoi après tout car je le connais à peine. Et pourtant, il me semble ressembler comme deux gouttes d’eau à son jeune héros Aulagnard. Aulagne, Sinerre, des noms inventés mais dont il ne faut pas chercher bien loin l’équivalence.
Raconter son enfance serait, pour un écrivain, presque un exercice de style si, en fait, ce n’était aussi le fond de commerce de toute littérature. Les précédents sont innombrables, des autofictions plus ou moins transposées, l’Aulagne d’Alain est le Combray de Proust, le Macondo de Marquez… Donc Alain fait dans le classique. Il fait aussi dans l’unité de temps et de lieu comme dans les pièces du Grand Siècle. 290 pages qui couvrent une seule journée, l’anniversaire de notre héros qu’il transforme en une seule leçon de chose.
Je ne me souviens pas où j’ai lu qu’il suffirait d’avoir vécu une seule journée pour pouvoir écrire de nombreux volumes. J’avoue que cette perspective m’avait laissé songeur. Je ne me sens pas trop capable de réussir cet exercice et j’avoue que, quand j’ai commencé le livre d’Alain et compris que tout se déroulerait réellement comme le dit son titre « en un jour », j’étais un peu inquiet. Et bien figurez-vous qu’il fait mieux que tenir la route. Avec ses personnages, Dogane le jeune étranger, pas de chez nous "les propres en ordre", donc à éviter, Milon un peu sorcier, le régent* et surtout Augustine la régente, sévère et bornée, le petit curé et surtout Monsieur Richard Mitte de Lucien, entrepreneur friqué et tout puissant que tous les gens du village semblent révérer, Alain Bagnoud nous captive. Je vous dirai un peu plus demain à quel point j’ai aimé ce roman.
* Régent - Instituteur en Suisse et aussi dans la Savoie de mon enfance. Il faut reconnaître que cela donne une autre dimension qu’instit même renommé « professeur des écoles »
19:20 Publié dans Lecture | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Découverte, valais |
18/06/2007
Nymphéas
Je voulais parler du livre d’Alain Bagnoud, ce sera pour demain car je ne résiste pas à la vanité de vous montrer mes nénuphars.
C'est un peu la crise du logement dans l'étang. J'avais acheté le rose en pensant que le blanc, dont j'avais cassé les rhizomes (trop lourds), en nettoyant l'étang, était foutu. C’était il y a trois ans, mais c’est coriace ces bestioles, le blanc se défend bien maintenant et il a repris ses jolies feuilles de nymphéas. Les nymphéas chers (oui le nymphéa est masculin) à Monet sont des nénuphars blancs avec ces feuilles marbrées que l'on voit à gauche. On constate que fleurs et feuilles sont impossibles à démêler. Il faudra attendre l'hiver pour faire le tri mais je n'aurais pas le coeur de choisir.
Cliquer pour le détail.
23:20 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (3) |
17/06/2007
Ergotisme et LSD
La maladie des ardents ou ergotisme est en fait une intoxication à l’ergot de seigle.
On a vu dans le note précédente qu'elle sévissait déjà en l’an de grâce 945... La dernière épidémie a eu lieu à Pont Saint Esprit dans le Gard, en plein vingtième siècle
Le seigle est une céréale rustique qui pousse sous des climats froids. Les populations souvent mal nourries cultivaient du seigle et étaient amenées à consommer des graines attaquées par l’ergot. Ils absorbaient des doses massives de LSD. C’est en effet en étudiant ce champignon que le chimiste suisse Albert Hofmann découvre le LSD, nommé aussi LSD-25 car c’était le 25e dérivé de l'ergot de seigle qu'il étudiait.
Mais est-ce que les possédées de Morzine souffraient de l’absorption d’ergot de seigle ?
Petite commune plutôt pauvre presque coupée du monde au XIXe siècle, dans une étroite vallée de Haute-Savoie , Morzine est le théâtre d'une étrange « épidémie » se déclarant au printemps 1857.
La première malade fut une petite fille, qui en sortant de l’église, vit retirer de la rivière une autre fillette qui avait failli se noyer. Cet événement l’impressionna beaucoup, mais elle se rendit néanmoins à l’école. Mais au bout d’un moment, elle tomba comme morte sur son banc. Par la suite, elle éprouva plusieurs fois la même chose à quelques jours d’intervalle. Deux mois plus tard, le mal se communiqua à l’une de ses amies. Puis, les jours suivants, les crises des deux petites devinrent plus fréquentes et leur début fut marqué par des hallucinations.
Plus tard, les deux fillettes furent prises d’accès convulsifs et elles, que l’on disait autrefois si douces, proféraient des blasphèmes et lançaient des imprécations contre leurs parents. Le mal gagna les frères et sœurs de ces deux enfants, puis s’attaqua à d’autres enfants de la commune qui furent en proie à des crises convulsives, à des phénomènes de somnambulisme et parfois de mutisme.
La population pense alors que les convulsionnaires sont des possédés du démon.
Pendant quelques années, la maladie persiste à l’état endémique. Les nombre de malades atteint 120 en 1861, en majorité des femmes victimes de crises répétées, au cours desquelles elles semblent possédées, frappant, hurlant et proférant insultes et blasphèmes. et l’on tente de l’enrayer par l’envoie d’un détachement d’infanterie et en implantant à Morzine une brigade de gendarmerie.
En 1863, le calme semble revenu, le poste de gendarmerie est retiré. Cependant, tout n’était pas fini. Début mai 1865, des dizaines de femmes furent prises de convulsions et se mirent à vociférer. Convaincue de l'origine surnaturelle du mal, la population appelle de ses vœux des cérémonies d'exorcisme, et traque comme hérétiques ceux qui gardent leur sang-froid...
Hystérie collective ? Maladie mentale ? Sorcellerie ? Possession démoniaque ? Toutes les hypothèses sont défendues y compris celle de l’ergot de seigle.
12:55 Publié dans hallucinant | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : sorcellerie, possedees |
15/06/2007
Diabolique
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Le
diable
et
le
mal
des
ardents
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Flodoard, chanoine à Reims vers l’an de grâce 945 rapporte l’apparition dans la région parisienne et aux alentours d’une étrange épidémie. « Un feu intérieur envahit les membres des hommes et des femmes. Insensiblement brûlés, ils finissent par être littéralement consumés jusqu’à ce qu’enfin la mort mette fin à leurs supplices ». C'est ce mal que l'on nommera "Le mal des ardents."
On sait que religion et superstition font bon ménage, et on imagine quelle terreur devait inspirer le spectacle de ces membres calcinés et détachés du corps (il doit en rajouter un peu le chanoine). Ce mal mystérieux était forcément une possession diabolique, une manifestation du feu de l’enfer, que seule la prière à saint Antoine pouvait guérir, c’est du moins ce que recommandaient les moines bien gras, nourris au pain blanc de la meilleure farine. Priez mes frères ! Priez !
Qu’elle était le cause de cette possession du diable qui continua d’apparaître, de ci de là, jusqu’à la fin du XIX ? Je vous raconterai plus tard ce qui est arrivé à Morzine, en Haute-Savoie vers 1860.
01:15 Publié dans hallucinant | Lien permanent | Commentaires (4) |
13/06/2007
Phagie
Savez-vous ce que sont les ratites? Eh bien ce sont des struthionidés? (Les struthionidés sont forcément struthioniformes sinon ils ne seraient pas.)
Ce sont des oiseaux au sternum en forme de radeau... donc sans bréchet. Mais peut-être êtes-vous déja stru-thioniphage ?
Mais c'est bien sûr, si ça se trouve vous êtes struthioni-phage et vous ne le savez même pas ? C’est bien possible. C’est une révélation que j’ai trouvé dans un livre de Jean Louis Ezine, un chroniqueur de France Culture. Vous savez que j’aime beaucoup les chroniqueurs, ils tentent de niquer le temps qui nous dévore et il faut les encourager. Eh bien Ezine expliquait, il y a plus de dix ans, (les livres voyagent lentement) que, par décret, la direction de l’alimentation non contente d’autoriser la viande de bison, s’était mis à encourager les bouffeurs d’autruche.
Bon, je n’ai pas pu garder la tête dans le sable très longtemps… Je sentais bien que je vous agaçais… je voulais vous intriguer et je vous agaçais, c’est tout moi ça ! Donc, je sors mes plumes d’autruche de mon… pour vous dire que les struthioniphages sont les mangeurs d'autruches et de leurs cousins moins goûteux les nandous d’amérique, les casoars d’Australie, les émeus, d'on ne sait où, et même l’aptéryx (photo) moins grand que l'autruche mais beaucoup plus lourd au scrabble. Ezine nous apprend que les plumes de nandous font de plumeaux, celles de l’autruche des danseuses et celle du casoar, le plus godiche de tous avec sa crète bleue et rouge, le shako des saint-cyriens, des officiers pas forcément tous élégants.
Est-ce bien raisonable de manger de l’autruche ? Ezine termine par ce mauvais calembour adressé au directeur de l’alimentation : « Ne fais pas à l’autruche ce que tu a fait à nos truies! »
Je suis tenté d'ajouter : « Et c’est ainsi qu’Allah est grand »
PS : Bon, à y regarder de plus près, on me dit que tous les ratites ne sont pas des struthionidés, encore un coup des classificateurs qui ne savent pas se décider. Cherchez par vous-même. Si après le casoar, vous trouvez un dodo, ou un solitaire de Rodriques, un râle ou encore un nicobar à camail c'est que vous êtes un grand lecteur de ce blog.
02:45 Publié dans Géographie | Lien permanent | Commentaires (1) |
11/06/2007
Philippe Muray
Connaissez-vous Philippe Muray ? Non, eh bien moi non plus, enfin jusqu’à tout à l’heure. J’ai trouvé un texte sur lequel je vais revenir sur le site du nouveau réac.
Mais qu’allais-je faire sur ce site moi qui me pique d’être plutôt progressiste ? Je ne sais pas. Certains diront que je deviens un vieux con et ils auront raison. Et comme dit la devise du journal l’imbécile auquel Murray participait : « Même chez l’homme le plus intelligent, il y a toujours assez d’étoffe pour faire un imbécile. »
C’est vrai que j’ai trouvé des échos dans la biographie de Muray (1945-2006) qui n’a cessé de combattre le monde moderne et qui fut un pamphlétaire riche de formules et de brillants raccourcis.
• « Ce devant quoi une société se prosterne nous dit ce qu'elle est. »
• « Le droit, c'est d'abord l'art de remplir les interstices. »
C’est ce dernier point, le droit, qui m’a attiré. Muray utilise la formule « envie de pénal. » Ce besoin de tout couvrir par une loi, cette judiciarisation de la société qui nous vient d’outre atlantique et qui nous amène les fameux droits opposables dont Sarko a parlé à propos des handicapés. Droit qui permettra à quelques nantis du savoir ou de l'argent de faire valoir le leur quand les droits des autres seront bafoués. Le début du texte de Muray :
« De cette légifération galopante, de cette peste justicière qui investit à toute allure l'époque, comment se fait-il que personne ne s'effare? Comment se fait-il que nul ne s'inquiète de ce désir de loi qui monte sans cesse ? Ah! la Loi! La marche implacable de nos sociétés au pas de Loi! Nul vivant de cette fin du siècle n'est plus censé l'ignorer. Rien de ce qui est législatif ne doit nous être étranger. "Il y a un vide juridique!" Ce n'est qu'un cri sur les plateaux. De la bouillie de tous les débats n'émerge qu'une voix, qu'une clameur "Il faut combler le vide juridique!"
(…)
Saintes Lois, priez pour nous! Enseignez-nous la salutaire terreur du vide juridique et l'envie perpétuelle de le colmater! Retenez-nous, ligotez-nous au bord du précipice de l'inconnu! Le moindre espace que vous ne contrôlez pas au nom de la néo-liberté judiciairement garantie est devenu pour nous un trou noir invivable. Notre monde est à la merci d'une lacune dans le Code! Nos plus sourdes pensées, nos moindres gestes sont en danger de ne pas avoir été prévus quelque part, dans un alinéa, protégés par un appendice, surveillés par une jurisprudence. "Il faut combler le vide juridique!" C'est le nouveau cri de guerre du vieux monde rajeuni par transfert intégral de ses éléments dans la poubelle-média définitive."
La suite ici.
01:10 Publié dans Au fil de la toile | Lien permanent | Commentaires (3) |
09/06/2007
La traque
Pour poursuivre le feuilleton lancé
par Dario
sur son blog
voici ma version de l'épisode
002
Bien sûr, vous devez avoir lu le premier
à l'adresse ci-dessus pour pouvoir suivre.
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Cher John,
Vous ne me connaissez pas et pourtant nous avons un passé et surtout un avenir commun. Je suis votre blog avec attention depuis deux mois et, croyez-moi, ce n’est pas par hasard. Je suis en mission. Désolé de devoir utiliser ce moyen de communication mais c’est celui que l’organisation a choisi pour moi car il importe que tout le monde soit informé en même temps que le jour est enfin arrivé et que chacun doit se tenir prêt.
Veuillez m’excusez de ne pas être plus explicite mais je sais que vous postez une note pratiquement chaque soir et que chaque matin vous êtes en quête de commentaires. Vous allez trouver dans votre email privé les instructions nécessaires, veuillez vous y conformer strictement. Je sais que vous êtes un homme digne de confiance et un père de famille responsable et que vous n’allez pas prendre de risque. C’est une des raisons qui a fait de vous un homme de choix. Soyez raisonnable et tout se passera bien.
Votre dévouée
Irina
Avant même de prendre son petit déjeuner, John mis en route son PC comme chaque matin pour voir si un message l’attendait, Il cliqua machinalement sur le favori qui conduisait à son blog. La veille, il avait mis une note assez percutante sur la modélisation de données. Il ne s’attendait à aucune réponse et c’est avec empressement qu’il cliqua sur le lien qui l’amenait sur le commentaire signé Irina.
John lu et relu le message. C’était sans doute un canular. De toute façon, il n’y avait rien dans sa boite électronique, même pas la réponse tant attendue de son chef sur ce voyage prévu à Singapour fin juin. Au fait d’où avait été posté ce commentaire d’Irina à six heures ce matin. L’adresse IP le menait directement à… Singapour. Il devait être plus de midi par là-bas.
00:30 Publié dans Ecriture | Lien permanent | Commentaires (5) |