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21/04/2024

Généalogie

Une nouvelle chronique "à la manière de" de Maurits Van Overbeke :
Je signale que ce billet démontre une fois de plus, s'il le fallait, que le créationnisme ne tien pas debout. Vive Darwin !
 
On oublie toujours qu’au commencement (la Genèse de la Bible), Adam et Ève étaient orphelins. Du moins en gros...
(image : Musée de Grenoble DOMENICO ZAMPIERI DIT LE DOMINIQUIN vers 1623 - 1625)

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Certes ils se promenaient tout nus dans les allées de l’Éden, cueillant une cerise par-ci, une baie par-là, mais n’avaient ni parents, ni grands-parents. Même pas d’oncle Eliezer ou Nathan. Ni de tante Abigaïl ou Jézabel. Avec des conséquences inouïes, que le Créateur, malgré son insondable providence, n’avait pas prévues. Car non seulement Adam ne fut jamais le fils de son père, comme nous le sommes la plupart du temps, mais même pas le petit-fils de son grand-père. Si bien que il ne put jamais hériter de la montre gousset de ce dernier.
 
De même, cette pauvre Ève n’obtint jamais en héritage une parcelle cadastrale exposée plein sud, avec un coquet château et une partie arborée traversée d’une rivière poissonneuse. Tout simplement parce qu’aucun paternel ne l’avait couchée sur son testament. Ce qu’il faut donc comprendre, c’est que nos premiers ancêtres n’eurent eux-mêmes pas d’ancêtres. Pas le moindre ! De nos jours, l’homme a un arbre généalogique, avec un géniteur putatif sur une branche porteuse. Et avec des grands-pères, grands-mères et bisaïeuls. Avec des oncles et tantes, des neveux et nièces, des cousins et cousines un peu partout, jusque sur les tiges les plus hautes de la couronne. Tandis que nos premiers ancêtres furent privés de cette arborescence touffue.
 
On voit par là à quel point les choses ont mal tourné depuis le début. Car si Jahvé avait modelé l’homme après mûre réflexion, il aurait commencé par lui donner des ancêtres. Pour qu’ils puissent élever leur progéniture, leur apprendre à s’habiller correctement, à se tenir à table, à ne pas parler la bouche pleine, à respecter les règles grammaticales du Bon Usage et à honorer père et mère. Pour qu’enfin ceux-ci puissent transmettre par héritage leurs terroirs et vignobles, leur château médiéval, leur commanderie, leur buffet Henri II, que sais-je ?
 
A la réflexion, on peut d’ailleurs se demander pourquoi Jahvé les façonna dans la force de l’âge, avec des corps bien fuselés pleins de biceps, de triceps (et même de quadriceps), qui ont tellement fait suer Michel-Ange sur les voûtes de la Chapelle sixtine. Tant qu’à faire, il aurait pu les créer non en taille adulte, mais en modèles réduits. En nourrissons, par exemple. Mais ce serait oublier que, depuis toute éternité, Jahvé avait été seul, avec personne à qui parler. On conçoit dès lors qu’il ait préféré créer non seulement des athlètes aux corps parfaits, mais aussi des gens avec un minimum de conversation, parfois des réparties spirituelles, peut-être même des réflexions théologiques. Et non des bébés en couches-culottes qu’il faut langer et biberonner, et qui ne parlent pas encore l’hébreu, le grec ou le latin, comme tout le monde.
(...)
A preuve, qu’on nous interdise de mentir, de voler et de tuer et bientôt nous trompons, dérobons et massacrons. Le plus beau dans cette histoire, c’est qu’en mai 68, on inventa le slogan paradoxal : « Il est interdit d’interdire ! » Pas étonnant que personne n’en ait voulu. Car s’il n’y avait plus d’interdits, où serait l’intérêt ? Surtout, où serait le plaisir ? Après tout, n’est-ce pas ainsi que les hommes vivent ?

15:51 Publié dans Vialatte | Lien permanent | Commentaires (0) |

05/04/2024

Gattopardo

Gatto : Chat
Pardo : Léopard (veilli)
 
D’ailleurs, il n’y a plus de poésie.
On n’en trouve plus que dans le guépard de dictionnaire. A la page 1050. Dans le Larousse illustré. En deux volumes et dans le premier. A côté de l’image d’un affreux animal qui tient du chat galeux et de l’âne ensellé et dont le texte vante l’élégance.
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Et comment sait-on qu’elles existent ?...
Cette définition insondable me poursuit depuis plusieurs jours. Elle me roule dans des abîmes. Elle met l’univers en question. Je n’y vois qu’une explication : le guépard, M. Larousse n’a pas osé nous le dire, mais c’est lui qui l’a inventé. Tel qu’il doit être. Avec ou sans crinière. C’est une création de son esprit, c’est une idée platonicienne.
 
Il se trouve que, dans la nature, un animal mi-chien mi-chat et à crinière a réussi (c’est notre seule chance) à ressembler à l’une des mille races de guépards qu’a inventées M. Larousse et qui comprennent (peut-on le savoir ?) le guépard bleu et le guépard sans crinière, le guépard à pois, le guépard à carreaux. « La seule espèce connue… », il y a là un regret… Ah ! Si on l’avait laissé faire !
Rien ne saurait mieux prouver à l’homme que ce monde n’est qu’un accident parmi des millions de mondes possibles. Le guépard particulièrement.
Nous vivons entourés de mille guépards chimériques, de mille possibilités de guépards toutes plus belles les unes que les autres.
Nous naissons et mourons dans la cage aux guépards.
(Et Nimier ? – La Montagne – 15 décembre 1953)

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04/04/2024

Avril

L’homme d’avril
Le soleil va entrer dans le signe du Taureau. C'est le moment où sont nés Rome, Hitler et Henry de Montherlant. C'est le mois où mourut le chevalier Bayard, c'est le mois où l'homme inventa le phonographe.
 
L'homme, sujet de toutes nos études et de toutes nos préoccupations, l'homme, l'enfant chéri de cette chronique (et de ce blog).
220px-Easterbunnypa.jpgQue fait-il en avril ?
Il plante la griffe d'asperge, il récolte l'oseille, il protège l'espalier avec des paillassons. Mais encore ? Il les change de place, il les enlève, il les remet mieux. Il s'évertue, il se démène, il sème la lupuline, il fume les vieux houblons. En un mot, il fait le diable à quatre.
La poule pond des œufs de Pâques. Le lièvre en fait autant. Du moins en Alsace et en Allemagne. La femme se livre aux nettoyages de printemps. Elle passe ses ongles à la « super-base », qui supprimera leurs peaux, à l'huile séchante, qui complétera le travail, et à la « laque fixante » qui protégera le vernis; enfin à la « crème abricot » qui stimule la croissance des griffes. Le printemps est là. L'agneau bondit près de sa mère et le poulain pur-sang près de la jument persane. Les épinards sont magnifiques ; et l'homme s'apprête, par les jeûnes du Carême, à célébrer la fête de Pâques dans les humbles dispositions qui conviennent au peu qu'il est : il mange la morue de brandade, il s’excite à s’améliorer. Bientôt, pourtant, il retombe dans l’ornière. Qu’il y croupisse !
Nous n’attendions pas mieux de cet animal mou.
Chronique des grands micmacs, p.169-170.

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01/04/2024

Poisson d'avril

Un joli pastiche de Maurits Van Overbeke publié sur Facebook pour ce premier avril. Oui, il n’y a ni honneur ni honte à naître au mois d’avril.

 
C’est un mois qui commence par un sac à malices, où chacun peut puiser selon son âge et son humeur. Il est étiqueté « poissons d’avril » en capitales d’imprimerie. L’employé de bureau y cherche un gros cabillaud en papier bristol, qu’il accrochera au veston du directeur. Lequel fera semblant de ne pas avoir remarqué la distinction taquine. Il circulera même plus que d’habitude dans les couloirs et les étages, où il ne rencontrera qu’amusement et euphorie. Même le trésorier et la caissière, d’ordinaire si réservés, ne pourront réprimer un sourire, quand il aura le dos tourné.
Et que fait la presse ? Comme chaque année, elle s’ingénie à inventer quelque fausse nouvelle. Laquelle doit tout de même rester assez vraisemblable pour que l’abonné crédule morde à l’hameçon. Rien ne servirait d’exagérer le bobard improbable, qui serait tout de suite pris pour ce qu’il est. C’est ainsi qu’on écrirait en vain que le gouvernement va supprimer le contrôle fiscal, que telle vedette de l’écran ne boira plus que de l’eau claire, voire que le pape s’est marié en grandes pompes. Voilà en effet des dépêches teintées par trop de vraisemblance contrariée. (Notons que certains journaux à gros tirage n’attendent pas le premier avril pour publier ce genre de bobards.) En revanche, qu’on rédige un entrefilet sur le prix de l’essence qui baissera de vingt centimes, un autre sur le cannabis qui sera bientôt en vente libre ou un troisième sur la Marseillaise, qu’on ne chantera plus en souhaitant « qu’un sang impur abreuve nos sillons », et voilà le lecteur plongé dans les abysses du doute.

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C’est sur ces farces et attrapes bon enfant que démarre le quatrième mois de l’année. Le soleil n’arrête plus de darder. Il flotte dans l’air une odeur de prairie humide, de terre labourée, de fringale et de pénitence. Les jardins se parent des taches jaunes dues aux genêts, forsythias, jonquilles et narcisses. Bientôt aussi aux mimosas, millepertuis et pissenlits. Dans les branches prêtes à la feuillaison, moineaux, mésanges charbonnières et rouges-gorges se hâtent de construire leurs nids. Résumons-nous : on a beau faire, le printemps sonne aux portes. Il est temps de lui ouvrir.
Si tous ces phénomènes arrivent à point nommé, il n’en va pas de même pour Pâques, qui est fête variable. Depuis le Concile de Nicée (325), elle doit tomber le dimanche qui suit la première pleine lune du printemps. Mais comme la lune est notoirement fantasque, il peut se passer plus de quatre semaines entre la Pâques la plus précoce (le 22 mars) et la plus tardive (le 25 avril). Si bien que le jardinier perplexe se met à douter des dictons les mieux établis. Car si on est au balcon à Noël (fête fixe), comment être sûr qu’on sera aux tisons à Pâques (fête mobile) ? De même, comment suivre sans scrupule le conseil « après le carême, bois ton vin sans baptême », si l’année dernière, à la même date, on n’était encore qu’à Laetare ? Et si le dimanche des rameaux tombe tantôt en mars, tantôt en avril, comment en conclure que le vent ne changera pas de sitôt ? Malgré ces décalages, l’homme profitera des rameaux pour faire bénir sa branche de buis. Il en plantera de petites tiges aux quatre coins de son champ d’orge, qui va de ce fait prospérer à vue d’œil. Il en accrochera aussi au crucifix de la salle à manger et au portrait de l’oncle Jules, tombé au Chemin des Dames en 1917.
Or, avril est aussi voué au Bélier et au Taureau, deux signes qui favorisent à la fois les heureux événements et les catastrophes. Parmi ces dernières, rappelons que c’est un 14 avril que le Titanic heurta un iceberg et fut envoyé par le fond emportant quelque mille cinq-cents passagers. Sachons aussi qu’Abraham Lincoln fut assassiné un 15 avril. Et qu’un 16 avril, dans la fosse 9 d’Hersin-Coupigny (Pas- de-Calais) un coup de grisou tua quarante-deux mineurs. Enfin et surtout, que c’est depuis le 26 avril 1986 que l’homme sait situer Tchernobyl sur la mappemonde. Quant aux heureux événements, parmi lesquels en compte souvent les naissances, on fêtera volontiers celle de Mahomet (le 22) ou de François d’Assise (le 29), mais on hésitera d’en faire autant pour Hitler (le 20) ou pour Lénine (le 22). Comme l’Évangile le fait dire à Jésus parlant de Judas : « Il eût mieux valu pour lui qu’il ne fût pas né ! » Encore qu’appliqué à nos deux Attila modernes, il faudrait nuancer ce propos. Ce n’est pas tant pour eux qu’il eût mieux valu ne pas naître, mais pour leurs innombrables victimes.
Notons d’ailleurs qu’il n’y a ni honneur ni honte à naître au mois d’avril. Car c’est un berceau où on trouve de tout. Et à toutes les époques. Il y a du Marc-Aurèle et du Charlemagne, du Léonard de Vinci et du Kant, du saint Vincent de Paul et du Landru. Mais le dessus du panier, c’est tout de même l’infatigable traceur du profil de l’homme, j’ai nommé Alexandre Vialatte, qui naquit le 22 avril 1901 à Magnac-Laval (Haute-Vienne).

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24/02/2024

Civilisation

Il y a des jours comme ça où l'on se désespère en écoutant les nouvelles qu'elles viennent d'Ukraine, de Galilée, de Gaza, du dérèglement climatique ou même de nos fermes et nos routes envahies de tracteurs. Que faire ?

couv-gengis-khan.jpgLe monstre le plus inquiétant s'appelle Poutine. Avec son copain aux US Donald, ils sont de vraies menaces pour la civilisation. On risque le retour à la barbarie des Khan, en particulier de Gengis dont nous parle Obadia dans son poème "Le petit Gengis"

 

  • Mais jusqu'à quand Gengis,
  • De manger cessera ?
  • Jusqu'à  quand Gengis Khan.
  •  
  • Et le vent du désert
  • Reprenait de concert
  • « Zusque-z-à quand Zenzis
  • Que z’à quand Zenzis Khan ?

On notera qu'au temps du sanguinaire Gengis, la Russie avait été avalée par les Mongols et son insatiable Gengis- Une Russie réduite à peau de chagrin ou à peau de chameau. Alors tu vois Poutine, avec ta grande Russie, tu nous fais plutôt marrer. Oui, comme Macron, je tutoie Putin.

V901xiwmUJMoWln1_hnhFEe2rEo@350x407.pngVialatte suggère de bien surveiller sa ponctuation. C'est grâce à ces détails, points et virgules, dit-il, que la pensée claire peut ressortir face à la dictature. Il a raison.

Voici ce qu'il dit dans sa Chronique hâtive de la ponctuation et de plusieurs phénomènes surprenants – La Montagne – 17 janvier 1971 :

Je voulais parler de la ponctuation. Et voilà que j’en ai presque honte.
 
Il y a une espèce de scandale à faire œuvre de civilisé dans un monde que la barbarie assiège comme un raz de marée. On se fait l’impression de jouer au bridge sur le radeau de la Méduse. On a l’air, comme les Byzantins, de discuter du sexe des anges quand l’ennemi secoue les portes de la ville. La civilisation est devenue un luxe réfugié sur une île à peu près désertique.
 
C’est pourtant, paradoxalement, le plus urgent et le plus utile. Il n’y a aucune futilité, dans un désastre, à s’occuper de régler le pas de vis d’un instrument de grande précision comme la pensée, qui est en péril du fait de la faillite de l’école. La ponctuation, dans un texte écrit, c’est 50% de la pensée.
 

12:13 Publié dans Ukraine, Vialatte | Lien permanent | Commentaires (1) |

14/02/2024

Colette

LZYPHFLHSBACFP76O4Z4TOCSFE.jpgEn vingt jours nous perdons Colette et l’Indochine.
Si on avait dit à Colette en 1890 que sa mort, pendant quelques jours, tiendrait plus de place dans la presse que la perte de l’Indochine, elle aurait ouvert des yeux ronds.
 
Tels sont pourtant le prestige du style et la lassitude d’une nation. Il faut croire que le style est une bien grande magie.
 
Le sien était insurpassable.
Il lui a permis de faire un sort glorieux à tout ce qui se voit, se sent, se lèche, se renifle ou se tripote. Elle a les doigts de l’aveugle et le flair du setter. Elle entre de plain-pied dans le mystère animal ; il n’y a eu, parmi tant, qu’un portrait de Landru : celui qu’elle a fait aux assises ; et c’était un portrait d’oiseau.
 
C’est d’elle que datent les dames mûres, les boules de verre (qui « mouillent la bouche »), le paon, le serpent, les traces du chat, la première ride, l’odeur du chocolat et le parfum de la chair fraîche.
 
C’est d’elle encore que date sa mère et toutes les fleurs.
 
C’est d’elle ou de Chardin que datent les pêches. Elle a peint le chat, le python et la femme de façon à rester pour toujours notre plus grand animalier.
(Paris l’été - La Montagne – 10 août 1954)

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11:22 Publié dans Vialatte | Lien permanent | Commentaires (1) |

20/01/2024

Verseau

Que fait l'homme par ce froid sec en ce mois de février ? Il naît sous le signe du Verseau ... Et il a bien raison. C'est le vrai moment de le faire. Le délai expire aujourd'hui.

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Après, tant pis pour l'homme, il n'avait qu'à se presser. Mais comment naître sous le signe du Verseau ? En ne s'y pre­nant, d'abord, ni trop tôt ni trop tard. (Trop tard on se noie chez les Poissons, trop tôt on tombe sur le Capricorne.) Et ensuite en achetant le Verseau qui vient de paraître aux Éditions du Seuil, dans la Collection du Zodiaque. Il sait tout de la question. Il procure mille recettes.
 
L'homme du Verseau naîtra par un soleil chétif, portant un poisson dans la main ; et dans l'autre une urne qu'il vide. C'est parce que février est le mois de la brouillasse ; les anciens s'en fai­saient l'idée la plus humide ; ils le représentaient sous forme d'une jeune fille qui empêchait sa robe bleue de traîner dans une flaque, entre un héron et un canard. Les anciens voyaient bien les choses : même aujourd’hui, en plein progrès des sciences, même à Paris qui est une grande ville, le boulevard Saint-Jacques, en dépit du froid sec, est couvert d’un brouillard gluant, qui ensevelit la fête foraine, rouille les cuivres du tir aux pipes et fait tousser les chevaux de bois ; le soleil n’est plus, au fond, qu’une petite orange plate ; la sirène est noyée, la voyante n’y voit plus.
La Montagne, 17 février 1959.

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