Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

09/05/2006

Arroyo

medium_amiguel.jpg
Uruguay


Montevideo

 

Arroyo del Miguelete

[Source]


Après Vialatte qui voulait chanter les fleuves de la terre, voici un arroyo uruguayien par Patrick Deville:

"Malgré l'immense beauté des rivières du monde, la splendeur des fleuves et des estuaires, on peut éprouver une tendresse particulière pour le cours très modeste de l'arroyo del Miguelete. Peut-être parce que c'est une histoire simple et banale comme une chanson d'amour réaliste, un boléro, qui commence bien, et qui finit mal. L'arroyo del Miguelete prend sa source au nord de Montevideo, dans la pampa de l'Uruguay, près de Canelones.
Après avoir consciencieusement abreuvé des milliers de vaches et arrosé des millions d'eucalyptus (qui, dans cinq ans, seront déjà débités en petites bûches rouges, et crépiteront dans la braise de la lena, sous la viande de ces mêmes vaches en asado), il déboule avec l'impatience d'un jeune péquenaud dans la banlieue de Montevideo, découvre ahuri les quartiers de tôles et de vieux pneus où survivent quelques potagers, longe comme un marlou le cimetière du Nord, avant de se faire coincer par les berges cimentées de la rambla Francisco-Lavalleja, que surplombent les maisons de la rue Eusebio-Valdenegro.

Dans les années trente de ce siècle, Baltasar Brum habitait l'une de ces maisons. (...)

Dès qu'elle s'éloigne du front de mer, des appartements à trois mille dollars le mois avec vue sur le Rio, des quartiers de Pocitos, de Buceo ou Carrasco, Montevideo jette assez vite l'éponge. Rues sombres et poussiéreuses. Stationsservice. Entrepôts. Épiceries ambulantes sur des charrettes à pneus. Pyramides de pastèques et montagnes de bananes. Des sacs en plastique flottaient à nouveau sur l'arroyo del Miguelete, dont le cours s'élargit vers l'aval. Il faisait le fier au soleil, se prélassait au milieu des pelouses et des grands saules du parque Prado, vivait son heure de gloire éphémère au coeur de Montevideo la coquette avant de disparaître le long de la raffinerie, jour après jour, usé, sali, avalé par les eaux douces et salées du Rio de la Plata, jusqu'au Vieil Océan ducassien."

00:05 Publié dans Géographie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature |

Les commentaires sont fermés.