09/03/2019
Mort sur le Tibre
Il se passe pas mal de choses à Rome depuis le mois de mars 2018 mais les événements les plus étonnants ce sont bien les suicides du professeur Lo Coco et de son ami Fernando Aiuti.
Dimanche dernier, Francesco Lo Coco était au restaurant Cuccurucù* en famille quand il s’est levé de table en disant qu’il allait aux toilettes et il s’est jeté dans le Tibre depuis le pont della musica à deux pas du restaurant.
Francesco Lo Coco, 63 ans, professeur d’hématologie était un scientifique éminent connu dans la monde entier pour avoir mis au point la première thérapie pour soigner la leucémie sans recourir à la chimio.
On ne connaît pas les raisons de son geste, il n’a pas laissé de message. On sait qu’il avait été très affecté par la mort de son ami le professeur Fernando Aiuti en janvier. Aiuti s’est jeté du quatrième étage de l’hopital Gemeli. C'était un homme politique et un spécialiste du sida, il s’est fait connaître par une photo ou il embrasse une femme séropositive lors d’un congrès sur la sida.
A ces suicides dans le milieu des mandarins de la médecine romaine on peut ajouter la mort en février du spécialiste du HIV Andrea De Luca. Les complotistes y voient la main du Big Pharma et ses milliards de dollars. Tout ceci devraient inspirer un écrivain de gialli (polars en italien).
* Les coqs italiens ne font pas cocorico mais cuccurucù ou chicchirichi d’où le nom de ce restaurant le long du Tibre et non loin du stade olympique. Les coq allemands font Kikeriki, les espagnols quiquiriqui, les japonais Kokekoko, les portugais Cocorococo etc...
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29/01/2019
Chaleur
Ici, ça caille mais dans le sud de l’Australie (qui est la partie la plus près du pôle) on atteint des records de chaleur.
Le thermomètre avoisinait jeudi les 50 degrés dans les environs d’Adélaïde. Des habitants recevaient de la bière gratuite*. Des chauves-souris en détresse tombaient des arbres.
Des agriculteurs ont dû abattre au moins 2.500 chameaux sauvages qui venaient manger la nourriture de leur bétail. Dans la région d'Alice Springs, on a abattu des chevaux sauvages mourants, près de leur mare sans eau.
Jusqu'à un million de cadavres de poissons ont été découverts sur les rives d'un grand réseau fluvial dans l'est du pays. A 900 kilomètres de là, des milliers d'autres poissons ont péri.
Le personnel du zoo d’Adélaïde passe des torchons humides sur les carapaces des tortues et donne aux wallabies des glaçons à sucer.
A part ça l'Australie s'est désengagé des accords de Paris à la suite de Trump. Scott Morrison le premier ministre conservateur, chrétien évangélique, s’occupe de choses sérieuses, les mœurs, il lutte contre le mariage homosexuel, il met en place une immigration zéro. C'est pourtant à l'immigration que le pays doit sa richesse. L’australien à la plus forte empreinte écologique du monde mais comme le gilet jaune il grogne face à l’augmentation de l’électricité due à la fermeture de centrales à charbon. Donc il continue à mettre la clim à donf.
* Adélaïde et la bière gratuite m’ont fait penser à cette belle chanson de Jacques Debronckart sur les hommes déracinés, les immigrés partis bosser loin de chez eux :
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13/01/2019
Nouvel an2
Le nouvel an chinois change chaque année car basé sur le calendrier lunaire mais les russes ont un deuxième nouvel an le 13 janvier dans le calendrier Julien. Le même vieux calendrier qui place la révolution du 7 novembre 1917 en Octobre. En 1582 Grégoire a ajouter 10 jours pour remettre les saisons en place. Au XXième et XXIième siècle on ajoute 13 jours, ensuite ce sera 14... et Vialatte en a parlé en 1962 dans une chronique.
Et le 13, ce sera le premier de l’an. Le premier de l’an russe, qui est fixé par le calendrier julien. Cinquante mille Russes fêteront ce jour à Paris en mangeant le bortsch, les zakouski, l’azou, le wzwar et le koulibiak, et en chantant d’une voix caverneuse. Des chants plaintifs. Par pure gaieté. « Je suis gai, disait Raspoutine, chante-moi quelque chose de bien triste. » Tel est le mystère de l’âme slave. Sa grande plaine lui donne le vertige. Le Russe aime le mêler à tout. Et en même temps il mange de petits oignons craquants avec le riz arrosé de citron et la longue brochette de mouton que le garçon brandit comme une épée. Dans un décor, autant que possible, de colonnes bariolées comme un manège forain. Ces choses lui rappellent son pays. J’ai demandé à un vieux chauffeur s’il s’en souvenait ; c’était si loin ; dans l’espace et dans le temps.
— Ah ! oui, monsieur, me dit-il, c’est vieux, c’était l’époque des tsars. En ce temps-là on avait le droit de grève...
La Montagne, 2 janvier 1962.
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06/01/2019
Epiphanie
6 janvier, épiphanie. A l’origine c’était la première date choisie par les pères et même les grands-pères de l'église pour la naissance du Christ.
Allez savoir pourquoi leurs descendants, les fils de l'église donc, ont a mis la chose 12 jours plus tôt, le 25 décembre. On dit que ces 12 jours symbolisent le décalage des 12 mois lunaires de l’année auxquels il faut ajouter 12 jours pour obtenir les 12 mois solaires. Pour repiquer vos salades ce printemps il était donc conseillé de surveiller le temps qu’il fait le 29 décembre, pour tailler les arbres on surveillera le 2 ou 3 janvier. Attention : « Pluie aux Rois, blé jusqu'au toit, et dans les tonneaux, vin à flot. »
Dans le ciel, on a la Vierge et le Bouvier (berger du boeuf) ensuite le Lion de la tribu de Judas, celle de Joseph père de Jésus. Dans la Cancer on a les Anes qui en grec se dit Phatnè - la crèche. Les mages peuvent venir. Matthieu nous le relate :
1 Quand Iéshoua' naît à Béit Lèhèm en Iehouda, dans les jours du roi Hèrôdès, voici, des mages du levant arrivent à Ieroushalaîm et disent :
2 "Où est-il, le nouveau-né, le roi des Iehoudîm ? Oui, nous avons vu son étoile au levant, et nous venons nous prosterner devant lui".
…
10 Ils voient l'étoile et se réjouissent. Ils offrent l'or, l'oliban et la myrrhe.
C’est le zoroastrisme qui introduisit l’idée de la résurrection, associée à la venue du Saoshyant, le messie né d’une vierge. Plus tard, le Saoshyant devint l’envoyé d’Ahura Mazda, l’incarnation divine de Mithra dans un homme qui devra ramener l’âge d’Or. L’islam shiite fit du Saoshyant le 13ème imam. Comme quoi la superstition ne date pas d'hier.
Les liturgies syrienne et arménienne qui ont une nette tendance à l’exagération parlent de douze mages. Les théologiens y ont mis le haut-là. Il y avait trois mages un point c’est tout : Melchior, un vieillard à cheveux blancs et longue barbe. Il offre l’or royal. Gaspard, jeune imberbe, teint rougeaud offre l’encens. Balthazar un noir barbu, amène la myrrhe qui annonce la mort et Pâques.
Mais Alexandre Vialatte le grand en parle mieux que moi :
Il n’y a rien de plus beau que les Rois mages. Surtout de nos jours. Ils sont plus noirs et plus dorés. C’est le nègre que je préfère. C’est Balthazar. Surtout quand il a une robe verte. Et le chameau. Au XVIIIe siècle on n’aimait pas qu’il y ait le chameau. Cet exotisme était proscrit. On protégeait les valeurs nationales. Je ne sais plus quel illustre peintre avait logé un dromadaire dans une Adoration des mages, pour entrer à l’Académie. Le jury lui en ferma les portes. Le chameau, lui dit-on, « distrayait l’attention ». Il est pourtant dans Isaïe : « Lève-toi, Jérusalem, et brille… Les dromadaires te couvriront en foule, les jeunes chameaux viendront de Median et d’Epha. » Ainsi l’Orient saluait-il l’Occident. (La Montagne, 24 décembre 1957)
Et encore…
La poésie, c’est le début de l’année. C’est les Rois mages avec leurs couronnes d’or, l’encens, la myrrhe, les robes rouges, les robes jaunes, le chameau à l’oeil dédaigneux, avec son profil de vieille dame, et son cou comme un tuyau de pompe. Et le nègre ; surtout le nègre ; à cause de sa robe verte.
Et tout le mois de janvier est comme ça. Comme un Breughel ; les enfants qui patinent, la vapeur qui leur sort du nez, le ciel noir, la terre blanche, les peupliers tout nus ; le schlitteur en bonnet de fourrure ; rien de plus charmant que les images de l’hiver.
Surtout quand on les voit de l’auberge, à travers une petite fenêtre. devant un grog fumant où nage un citron pâle.
Quand on a eu bien froid et qu’on aura bien chaud.
(La Montagne – 9 janvier 1964)
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02/01/2019
Agapes
Le début de l'année a été marqué par la routine des indigestions habituelles. L'homme, en effet, au début du solstice, fête l'hiver en ruinant son foie. L'oie traîne le sien comme un fardeau. Le financier aisé le déguste avec des truffes dans une porcelaine de grand prix. Le financier moins aisé, comme le facteur rural, le marchand de singes ou le poète lyrique, le mange avec des « pommes salade» dans une assiette d'un moindre prix. Sous une forme atténuée, telle que le fromage de tête.
Ces excès épaississent le sang et figent la bile dans le canal cholédoque. On prendra des bouillons légers et des pharmacies décapantes pour écouvillonner les coudes de l'intestin. Un jeûne léger, des musiques douces et des rêves optimistes chasseront petit à petit le plus gros du délire. Les urines deviendront plus claires. L'épouse se promènera dans tout l'appartement en agitant du papier d'Arménie. Les amis auront le droit d'apporter des oranges, des proverbes, des mandarines. Le médecin présentera sa note.
On fêtera la convalescence en chantant des chansons à boire autour d'un homard Thermidor suivi d'une choucroute mitonnée couronnée de saucissons de Morteau. Le gigot sera tendre et les fromages intéressants. On reprendra des boissons. De 23 heures à 5 heures on mettra une sourdine pour ne pas réveiller les voisins. Le lendemain on tirera les rois. Une maîtresse de maison pratique utilisera les bouteilles vides qu'elle découvrira sous les tables, dans le couloir et la salle de bains, pour nettoyer la dentelle noire ; enroulez la dentelle autour de la bouteille et baignez-la dans la bière.
Vialatte - La Montagne, 2 janvier 1962.
10:28 Publié dans Blog, Vialatte | Lien permanent | Commentaires (1) |
01/01/2019
Nouvel an d'antan
Pour la nouvelle année un peu de Vialatte...
Il était longtemps d’usage, le matin du 1er janvier, que le grand-père, vêtu d’un bonnet grec et d’une robe de chambre à ramages, s’asseye au coin d’un feu de bois dans une bergère Louis XIV pour recevoir les compliments et les vœux de ses petits-enfants. (…)
Les dangers du feu de bois, le prix de la bûche de chêne, le mépris de la poésie, les progrès de l’industrie électroménagère et les conquêtes de la médecine dans la gérontologie ont fait abandonner ces rites et modifié la physionomie du jour de l’an.
Il arrivait fréquemment en effet que le grand-père, qui était nécessairement un civil ou un militaire, fût affligé d’une jambe de bois par suite des guerres ou des accidents du travail. Il ne pouvait se chauffer les pieds ni somnoler au coin du feu sans enflammer sa jambe artificielle ; d’autant plus qu’elle était très sèche et terminée par une rondelle de caoutchouc, matière extrêmement inflammable. Il arrivait aussi qu’un héritier pressé rapprochât trop de la cheminée le fauteuil où sommeillait l’aïeul ; sans parler des grands-pères terribles qui cherchaient à camoufler un affreux suicide en accident.
Alexandre, almanach des quatre saisons, p.20-21.
En tant que papy moderne, je suis bien content que ces coutumes soient définitivement révolues.
Encore une louche de Vialatte comme étrennes
(sait-on encore ce qu'étaient les étrennes ?)
Le premier de l’an date de la plus haute antiquité. Si loin qu’on remonte dans l’histoire de la Terre, les années ont toujours fini et recommencé. Si bien que le premier de l’an date de bien avant l’homme. Il en a pris une majesté considérable. Il ne cessera que le jour où la Terre, qui tourne à une vitesse terrible, sera usée par le frottement. Son rayon diminue chaque jour. Chaque jour rapproche donc l’homme du centre de la terre. Le dernier jour, n’ayant plus de support, il tournera autour de ses pieds.Finalement, il mourra de vertige.
« Chronique découragée du premier jour de l’an ». La Montagne, 31 décembre 1967.
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14/12/2018
Paris J4
On traverse les Halles. Il fait encore un temps magnifique. Un peu frais peut-être. On passe par la boutique Lego, une tradition comme la recherche de l'écharpe introuvable, encore que cette fois on l'a trouvée.
Le grand sapin dans le trou. L'église Saint Eustache et en route pour passer la reste de la journée à Beaubourg.
Le cubisme au dernier étage. Picasso, Braque mais pas que... Beaucoup de toiles et un panorama complet depuis Cézanne jusqu'aux successeurs.
A la bibliothèque expo Riad Sattouf. Comme on vient de lire le 4 de l'Arabe du futur, on n'y passe un moment. Pas mal de gens qui se marrent en regardant les planches affichées. Les Cahiers d'Esther et aussi La vie secrète des jeunes adaptée sur Canal+.
Après le casse-croûte à la cafétéria du premier étage (pas terrible) visite de l'expo Tadao Ando.
Un architecte japonais autodidacte et qui fait parti des tout grands de la profession avec Gerry, Nouvel, Piano, Pei, Botta... Il a entre autre dessiné la pointe de la Dogana à Venise (musée Pinault), des maisons et des musées au Japon...
Sur le texte accompagnant le Château Lacoste, un lieu de vin où ont contribué une brochette de grands architectes, il y avait un texte "La joie de se sentir Vivre". Un petit malin avait biffé le V.
Tout près des Halles, sur des dessins d'Ando, rénovation de la Bourse du Commerce pour en faire un autre musée Pinault (merci Bernard dirait Ruffin !). C'est sympa les musées et les Airbnb mais que va devenir le ville de Willy Ronis sans habitants ?
Retour au bercail non sans subir la joie des retards SNCF. Trois heures de suspens sur la correspondance pour finalement arriver à l'heure.
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