29/05/2011
Lordon - Théatre
Frédéric Lordon, dont je parlais hier, a écrit une pièce de théatre en alexandrins sur la crise financière. D'un retournement l'autre.
Extrait paru dans le monde diplo.
Acte III Scène 2
Bureau du président de la république. Des banquiers, des conseillers...
Le banquier
Monsieur le Président, votre haut patronage
Nous offre l’occasion de multiples hommages.
A votre action d’abord qui fut incomparable
Et victorieusement éloigna l’innommable.
Mais à votre sagesse nous devons tout autant
La grâce que nous vaut le parfait agrément
De vous entretenir et d’avoir votre oreille,
Pour éloigner de vous tous les mauvais conseils.
Le quatrième banquier
Nous savons le courroux qui saisit l’opinion,
Tout ce que s’y fermente, toute l’agitation.
Nous entendons la rue rougeoyant comme forge
Vouloir nous châtier, nous faire rendre gorge.
Le peuple est ignorant, livré aux démagogues,
Outrance et déraison sont ses violentes drogues.
Il n’est que passion brute, impulsion sans contrôle,
Un bloc d’emportement, et de fureur un môle.
Le troisième banquier
Mais nous craignons surtout que des opportunistes,
Sans vergogne excitant la fibre populiste,
Propagent leurs idées, infestent les esprits.
Ils ne nous veulent plus que raides et occis.
Même les modérés sont assez dangereux.
Incontestablement ils semblent moins hargneux,
Et s’ils n’ont nul projet de nous éradiquer,
Ils ne veulent pas moins nous faire réguler...
Le banquier
Il ne faut rien en faire, monsieur le Président,
La chose n’aurait que de grands inconvénients.
A-t-elle en apparence le renfort du bon sens ?
Elle n’en est par là que plus grande démence.
Le marché, de la crise, doit sortir raffermi,
Certes il connaît parfois quelques péripéties,
Mais toute la nature est sujette à des cycles,
Il n’y a pas là de quoi édicter des articles.
Qui voudrait s’opposer au retour des saisons,
Empêcher des planètes la révolution ?
Aux marchés nous devons ce genre de sagesse,
A ses fluctuations il faut que l'on acquiesce.
(...)
Le nouveau conseiller
La mission, l'enthousiasme et l'intérêt commun,
Ne sont-il pas touchants nos bons samaritains ?
Ah! le joli spectacle, les merveilleux acteurs
On les croyait arsouilles, ils sont nos bienfaiteurs.
(...)
Cyniques ou crétins ? C'est toute la question.
Une aimable réplique répond à sa façon
En disant de ces gens qui n'ont aucun arrêt :
A ce qu'ils osent tout, là on les reconnaît.
(référence à une célèbre réplique d'Audiart sur les cons.)
09:54 Publié dans Au fil de la toile, Libéralisme, Textes | Lien permanent | Commentaires (1) |
28/05/2011
Frédéric Lordon
Connaissez-vous Frédéric Lordon ? C'est un économiste français indispensable. Il est directeur de recherche au CNRS.
Ses travaux comportent notamment un programme de recherche spinoziste en sciences sociales et ses récentes propositions concernant la crise financière avec son ouvrage Jusqu'à Quand ? Pour en finir avec les crises financières ont été accueillies avec intérêt.
Il propose un impôt nommé le SLAM (Shareholder Limited Authorized Margin, ou marge actionnariale limite autorisée) pour lutter contre les « ravages de la finance ». Le SLAM consiste à fixer un niveau de rentabilité actionnariale maximale au-delà duquel est appliqué un taux d'imposition confiscatoire.
Ecoutez le répondre à l'intriguante question, déjà posée par Kou l'ahuri, : "Les financiers sont-ils plutôt cons ou plutôt cyniques ?"
Frédéric Lordon parle du monde de la finance par Complot_helleno_balayeur
09:48 Publié dans Au fil de la toile, Duboin, Libéralisme, On nous ment | Lien permanent | Commentaires (0) |
27/05/2011
Ella
« J’ai trente ans. C’est là une dernière chance pour corriger ma manière de vivre, une dernière tentative pour me prendre en main. Ce voyage ne sera pas une folle escapade, comme si nous avions vingt ans ; et d’ailleurs ce serait impossible avec l’actuelle tragédie européenne. Ce voyage doit nous aider à atteindre notre but : devenir enfin des êtres conscients, capables de répondre d’eux-mêmes. Il m’est devenu insupportable de vivre ainsi à l’aveuglette… Quelle est la cause, quelle est la signification de ce chaos qui sape hommes et nations ? Et puis, enfin, il doit y avoir quelque chose que je puisse faire de ma vie, une idée, un but pour lequel je puisse mourir avec joie ou vivre. »
Ella Maillart - La voie cruelle (dans les années 30) - Citation envoyée par Trystan
Ella est une des voyageuses les plus étonnantes du 20e siècle. Exploratrice par quête de vérité, photographe par goût, écrivain et journaliste par nécessité. Ella Maillart, célèbre pour ses multiples exploits sportifs, ses voyages et ses livres, va parcourir les régions les plus reculées de la planète dans des conditions qui relevaient de la plus pure aventure.
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24/05/2011
Sexual-athée
Une étude menée sur 14.500 personnes par des psychologues de la Kansas University conclut que les personnes athées ont une sexualité plus épanouie.
A pratiques égales (nombre de rapports par semaine, masturbation, films pornos, sexe oral…) la qualité de la sexualité varie. En effet selon l'étude, les croyants apprécieraient moins leurs relations en raison de la stigmatisation que leur religion opère sur la sexualité. Cela engendre, une fois l'acte accompli, un profond sentiment de remords.
L'étude montre que plus la croyance est forte chez un individu, plus forts seront ses sentiments de remords sexuels. Ainsi, sur une sorte d'échelle de la culpabilité, explique Boing Boing, les mormons viennent en premiers, avec un score de 8,9 sur 10; suivis par les Témoins de Jéhovah, les pentecôtistes, et les baptistes. Les catholiques et les luthériens réalisent un score de 6/10, alors que les athées et les agnostiques ne dépassent pas le seuil de 5/10.
Bonne nouvelle : Mais, toujours selon l’étude, il y a une réelle possibilité d'amélioration de la vie sexuelle en cas de perte de la foi. «Nous pensions que la religion aurait des effets résiduels sur les personnes qui ont arrêté de croire, or l'étude prouve le contraire. C'était une bonne surprise», raconte Darrel Ray à alternet.org.
10:17 Publié dans Au fil de la toile | Lien permanent | Commentaires (0) |
21/05/2011
Sidération
Image:
Anatomie d'un arrêt cardiorespiratoire (temporaire ?)
La toile bruisse de sidération. Une certaine affaire arrivée dans un Sofitel de New-York sidère les Français. La dernière utilisation de ce verbe date de PPDA se disant sidéré par les accusations de plagiat portées à son encontre.
Pourquoi avoir choisi sidéré plutôt que surpris, étonné, ébahi, affecté, abasourdi, troublé, bouleversé, médusé, stupéfié, interloqué, fasciné, estomaqué, hébété, ahuri, consterné, atterré, terrassé, abruti, affligé, foudroyé, accablé, attristé, abattu, démoralisé… Un problème d’étoiles sans doute.
Il est clair que l’événement va changer le cours de l’histoire, pas besoin de lire dans les astres pour le comprendre. Retour à une politique plus droitière au FMI, candidature plus à gauche au PS… Si on croit que les hommes changent l’histoire, on peut penser que ce coup va influencer notre destin.
Cela tombe bien car sidéré comme sidéral nous vient des étoiles. Du latin siderare, subir l’action funeste des astres. Sidus – sideris en latin constellation en parlant de l’influence sur la destinée. C’est un petit peu de cela dont il s’agit dans l’inconscient collectif de ces français sidérés qui pensent qu’un homme peut faire pencher le destin de tous.
Les gens de gauche sont particulierement touchés au cœur mais ils s’en remettront comme un banal myocarde sidéré qui, comme chacun sait, est une atteinte du myocarde réversible, se caractérisant par un mauvais fonctionnement du ventricule gauche survenant spontanément et dû à une diminution de la circulation sanguine qui fait suite à une fermeture du calibre des vaisseaux.
08:53 Publié dans Au fil de la toile, Mots | Lien permanent | Commentaires (2) |
20/05/2011
Ne pas céder
Ne pas céder face à la pluie
Ne pas céder face au vent
Ne pas céder non plus face à la neige ou à la chaleur de l’été
Avec un corps solide
Sans avidité
Sans perdre son tempérament
Cultivant une joie tranquille
Chaque jour quatre bols de riz complet
Du miso et un peu de légumes à manger
Dans toutes les choses
Sans y mettre ses émotions
Voir, écouter et comprendre
Et sans oublier
Dans l’ombre des bois de pin des champs
Vivre dans une cabane au toit de chaume
S’il y a un enfant malade à l’Est
Y aller et le veiller
S’il y a une mère fatiguée à l’Ouest
Y aller et porter sa gerbe de riz
S’il y a quelqu’un proche de la mort au Sud
Y aller et lui dire qu’il n’y a pas besoin d’être effrayé
S’il y a une dispute ou un litige au Nord
Leur dire de ne pas perdre leur temps en actes inutile
En cas de sécheresse, verser ses larmes de sympathie
Lors d’un été froid, errer bouleversé
Appelé un bon à rien par tout le monde
Sans être complimenté
Ni rendu responsable
Une telle personne
Je voudrais devenir
Kenji Miyazawa est un poète japonais toujours très lu au Japon. Né en 1896, l’année du tsunami de Meiji Sanriku, qui a fait environ 22 000 morts, et il est décédé à l’âge de 37 ans en 1933, l’année du tsunami de Showa Sanriku, qui a causé 3 000 morts et disparus. Sa vie semble étrangement liée aux tsunamis. A l’époque où vécut Miyazawa, les catastrophes naturelles et les mauvaises récoltes se succédaient et les tragédies telles que les suicides familiaux et les ventes de jeunes filles par leurs parents étaient nombreuses.
12:21 Publié dans Textes | Lien permanent | Commentaires (1) |
17/05/2011
L'heur de l'heure
Le mot heure vient du latin hora, lui-même emprunté au grec hôra qui désigne un moment qui revient de façon cyclique (les jours, les saisons, le petit déjeuner…)
En français, ce peut-être un temps précis (à quelle heure ?) ou une durée (on s’est emm.. pendant deux heures). Dans ce cas l’heure est d'ailleurs égale à la plombe qui peut parfois durer assez longtemps, une grande heure, ou d'autres fois pas très longtemps, une petite heure, une heurette, et puis une lurette, une petite heure, qui qualifiée de belle devient une très grande heure. Il y a belle lurette.
Attention de ne pas manger à toute heure, mauvais pour le régime. A la bonheur, vous n’êtes pas des grignot'heurs. On peut se lever à la première heure mais on ne sait jamais quelle est notre dernière heure. Pas moyen de mettre le réveil, même si notre heure a déjà sonnée car de toute façon on ne s’en réveillera plus. Depuis Giscard l’heure s’estive, elle prend ses quartiers d’été. Mitterrand donnait du temps au temps, sans nous dire combien il y a d’heures dans le temps ? Depuis Sarko l’heure légale est devenue supplémentaire et même défiscalisée.
En vrac le grec hôra à donné horodateur, heure, heurette, lurette, d’ores et déjà, dorénavant, désormais, lors, lorsque, encore, horaire, horloge (de Morez ou de Morbier), horloger et même horoscope (qui examine votre heure).
En italien on demande "Che ore sono ?" après deux heures mais "Che ora è ?" si on pense qu'il est une heure environ, mais alors pourquoi poser la question ? Pour les minutes sans doutes. Du latin minutus, de minuere, diminuer. Les heures croissent (plus), les minutes décroissent (minus). Ainsi va la vie.
Quant au bon-heur, je l’ai déjà écrit c’est de vivre l’instant présent sans se soucier de l’horloge, de l’heure, des minutes, ni de lors ni de désormais et encore moins de dorénavant ou dorénarierre. Le bonheur comme l’heure peut être fuyant, cyclique et même cyclothymique. Il est dans le pré, courts-y vite, cours-y vite, il va filer.
14:21 Publié dans Au fil de la toile, Mots | Lien permanent | Commentaires (2) |