30/06/2018
L'été
... l'été sévit.
Le soleil tombe d'aplomb.
Le ruisseau tarit, la vipère se dessèche.
Le porc-épic rôde autour des campings, avide de sel pour fixer l'eau dans le sang. Il ronge les selles, les mocassins, les manches de pioche, tout ce qu'imprègne la sueur humaine, qui est riche en chlorure de sodium.
Aux terrasses des cafés, on voit des hommes superbes, gras et massifs, les cheveux coupés en brosse, la chemise ouverte sur la poitrine, boire sans fin des demis de bière dorée que leur apportent incessamment, sur des plateaux qui passent en l'air au-dessus des têtes, des garçons surveillés par le maître d'hôtel qui a une tête de grand éditeur.
Les brasseurs édifient des fortunes incroyables. Ils ne voyagent plus qu'en première dans le métro. Leurs enfants, gâtés par l'argent, prennent des habitudes désastreuses. Ils se suicident du haut du rocher de Monaco. La mer les jette sur le rivage à marée haute et les remporte à marée basse. La lune brille sur les vagues sinistres comme dans un poème de Hugo.
C’est pourquoi l'homme part en vacances à la recherche de la fraîcheur.
Les vacances datent de la plus haute antiquité. Elles se composent régulièrement de pluies fines coupées d'orages plus importants. Ils attaquent à la mitraillette. La foudre tombe sur le clocher du village ; elle enflamme les toits de chaume, elle affole les taureaux qui se répandent dans les rues et chargent les hôtels où ils se prennent souvent dans le tambour de la porte, ce qui empêche tous les clients de sortir. Les clients sont furieux, on retarde le dîner. La flamme, les fauves, les portiers hébétés, le vieux berger foudroyé sous un chêne composent un tableau shakespearien.
Il arrive même parfois qu’il ne pleuve pas du tout. On aime citer sur les côtes de la Manche, le cas fameux de M. Mac Corner qui, venu d’Édimbourg par gros temps. mourut d`insolation sur la plage de ses rêves. Le syndicat d`initiative reconnaissant lui fit élever une statue de bronze au moyen d`une taxe spéciale.
Ce monument enseigne au touriste sceptique qu`il peut faire beau même pendant les vacances et au touriste raisonnable que la chose n'est pas à souhaiter. Il représente M. Mac Corner presque nu, coiffé dune casquette plate, armé d'une vaine ombrelle et entouré d'un jupon de bronze qui rappelle son pays natal. Il est étendu sur le sable. À côté de lui. sa valise en fibrine répand des produits écossais ; un médecin en jaquette, accroupi soucieusement, agite sans résultat une grande serviette éponge. Sur le socle un bas-relief de marbre représente d'un côté La défaite d'Esculape et de l'autre Le triomphe du soleil.
La Montagne, 19 juillet 1966.
10:41 Publié dans Vialatte | Lien permanent | Commentaires (3) |
Commentaires
Que c'est savoureux ! La brasserie c'est en bas ou au sommet ? Je ne connais le Salève que du bas.
Écrit par : Aredius44 | 05/07/2018
C'est au pied du Salève. Michaël le brasseur fait des bières exceptionnelles. Sans doute pas facile à trouver hors de la région quoiqu'avec Internet... https://bieronomy.com/35__brasserie-du-mont-saleve
Écrit par : Joël | 07/07/2018
Tu m'as amené à me replonger dans mes Vialattes. J'ai mis sur le blog.
Comme tu ne nous parle pas du foutbal, je mis suis mis
http://lefenetrou.blogspot.com/2018/07/au-foot-la-france-669-millions.html
Bon été
Henri qui va devoir attendre peut-être un an avant d'avoir une carte grise pour sa voiture d'occas. LE progrès avec les informaticiens 3.0. Mais on ne te l'écrit pas sur le site Oueb de l'Administration. A la préfecture on m'a conseillé de demander une assurance provisoire d'un an ! Vialatte aurait de quoi écrire.
Écrit par : Aredius44 | 12/07/2018
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