28/11/2006
Lulu
Texte écrit en respectant la contrainte des 13 mots à la douzaine No 2
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Ma chère Christine,
J’avoue que j’étais assez tenté de participer au jeu numéro 4 et puis j’ai pensé à Lucien. Je ne sais pas si je t’ai déjà parlé de Lucien. Lucien est l’homme le plus atypique que je connaisse. C’est à la fois une sorte de trublion de la photographie et un papy respectable de la pellicule argentique. Un jour il t’explique qu’à son âge, il a renoncé à tous les plaisirs, la chair et la bonne chair, le lendemain il te parle de son oaristys avec une actrice jeune et jolie, un mot qui signifie idylle et qu’il est allé piquer dans une pièce de Jacques Tremblay. Il fait sans cesse des clichés de sa belle, il te bassine avec l’appel du désir comme l’agitation câline d’une onde passant de fleur d’eau à fleur de peau, avec le mouvement d’éveil des sens… la photo dansée licencieuse, érotique et interdite. Tremblay, une découverte de Lucien le roi de la serendépité.
Plus tard il te gavera avec un discours sur la protection des batraciens, il te parle d’une petite rainette verte qu’il a photographiée et recueillie dans les marais. Le lendemain, sans préambule, il te raconte sa soirée dans un restaurant de la Dombe où il prenait de bêtes photos de mariage et où il a mangé, paraît-il, les meilleures cuisses de grenouille de France.
Un autre jour, magnanime, il t’explique avec un enthousiasme que pour un diariste comme lui, habitué depuis des lustres à se mirer dans la page blanche, le blog est une aubaine fascinante, la semaine suivante, frappé d’aboulie et de sinistrose, il défie tous les blogueurs et te racontant l’altercation molle qu’il vient d’avoir avec un de ces cinglés de la toile qui n’a rien compris au journal intime et à la photo artistique et surtout qui ne voulait pas reconnaître que tout ce pataquès que l’on fait avec le Web ne sera jamais qu’un feu de paille, un piratage d’idées bateau, une misère de gens qui n’ont jamais rien à dire.
Tu vois Christine, il faut vraiment que je te fasse connaître Lucien, l’homme de toutes les contradictions, des passions et du renoncement, capable de photos surréalistes comme ce peintre qui peint la neige du Semnoz ou à l’inverse de clichés très véristes à la Doisneau ou à la Willy Ronis. C’est bien simple, s’il fallait un mot pour résumer Lucien ce serait oxymore, Lulu est un oxymore sur pattes… avec appareil de photo.
Amitiés
Joël
21:45 Publié dans Textes | Lien permanent | Commentaires (2) |
Commentaires
Superbe le portrait du Lucien. On jurerait presque l'avoir déjà rencontré quelque part... C'est de la fiction ou c'est basé sur un personnage réel ?
Écrit par : dvanw | 30/11/2006
En fait ce portrait est une chimère. Il y a un peu de mon copain Lucien et beaucoup de la contrainte des 13 mots... Ce qui m'a inspiré c'est le mot Oxymore, le titre d'une expo de Lulu.
Quelques photos de Lucien en suivant les liens:
http://perinet.blogspirit.com/archive/2006/08/14/artiste.html
Un souvenir de ballons perdus:
http://perinet.blogspirit.com/archive/2005/10/17/le-concept-a-lulu.html
Écrit par : Joël | 30/11/2006
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