Heureux?
26/08/2005
HEUREUX. Aie, je ne m’y attendais pas. Ma première réaction a été le refus, il n’est pas question que je sois heureux, non mais sans blague !… Je veux être un écrivain malheureux et maudit… comme Cribas.
Et puis je me suis dit que si Dilettante le pense, il doit y avoir un petit quelque chose de bonheur qui passe sur ce blog et sur ceux auxquels je participe. C’est un peu comme l’âge, jusqu’à que l’on me salue régulièrement d’un « bonjour monsieur » déférent, je ne me sentais pas vieux. D’ailleurs, même après, je n’arrive toujours pas à me sentir vieux. Dans ma tête j’ai toujours dix-huit ans, tant pis si ça ne se voit pas.
On vit sa vie avec dans la tête des postures acquises vers l’adolescence et un peu après. Par exemple quelqu’un de raisonnablement mince mais qui fut un ado enveloppé aura tendance toute sa vie à se considérer comme gros et vice-versa. Je me souviens d’une discussion étonnante entre Guy Carlier et Marc Olivier Fogiel qui illustrait exactement ce propos. Marc-O était un ado grassouillet et Guy n’était pas le bibendum qu’il est devenu, dans leurs têtes ils étaient restés respectivement gros et normal (Carlier mince, faut pas exagérer).
Pour revenir au bonheur, c’est bien sûr plus complexe que le manque ou l’excès de poids.
La quête du bonheur ? J’en ai une approche à la Cioran, “le grotesque en rose, le besoin d’associer l’invraisemblable au devenir… » Le bonheur n’existe que par des petits instants à savourer, c'est tout. Ceci dit, je me sens en effet plus apaisé aujourd’hui. J’ai envie d’écrire des choses plus légères et des histoires plus drôles qu’éclats et pulsations. La phrase de George Duhamel : « L’humour est la politesse du désespoir » est ma devise.
Quant à la relation du malheur avec l’écriture ou l'art en général, c’est un sujet trop bateau pour que j'ai envie d'en débattre. Il y a quelque chose de connement judéo-chrétien dans cette idée que seuls ceux qui souffrent peuvent faire de belles choses.
Certe Musset a écrit, un jour de bonheur :
Les plus désespérés sont les chants les plus beaux,
Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots.
Bon. Bien. D'accord, mais je ne vise pas à ces sommets de beauté.
19 commentaires
En lisant par dépit "Extension du domaine de la lutte" dans le train parce que je n'avais pas reçu "Ophélie a du chien", j'ai soudain eu une illlumination sur la notion d'écrivain maudit, de sacrifier son bonheur à son oeuvre, c'est facile, il suffit d'être et de se maintenir malheureux.
Extension, j'avais bien aimé.
Ben oui, c'est ringard le bonheur...on ose même plus être heureux, devant le malheur des autres, surtout ajourd'hui. C'est dommage, j'aurais bien essayé moi. Tout est de la faute de Musset, c'est bien connu... ;)
L'avantage de faire croire qu'on est malheureux quand on a du succès est de calmer un peu la hargne des envieux ;-)
Tout a fait Thierry. Bien vu. Tu t'installes à Marbella ou en Irlande et par tes conseillers en communication tu fais savoir à cette presse de requins avides que ton prochain roman est en train de détruire ta vie tellement il absorbe d'énergie créatrice et que, d'ailleurs, écrire est la chose la plus difficile et suicidaire qui soit... que tu ne peux voir personne et que seul ton chien t'apporte un peu de soulagement...
Remarque que dans le cas de Céline, c'était presque vrai, lire les entretiens avec le professeur Y. Hillarant.
La mise en scène fait partie intégrante de l'art, il ne faut pas l'oublier. Tout ce qu'on donne à voir est significatif, et surtout contrôlable.
Demeure que la maîtrise du discours dégage un grand pouvoir, et que ce pouvoir peut détruire celui qui le manipule avec maladresse. Produire une oeuvre aussi puissante et novatrice que celle de Céline constitue une aventure dangereuse pour l'esprit. On s'aventure dans l'inconnu, et les repères disparaissent. On se retrouve seul à déterminer le bien et le mal. Il faut être solide pour en sortir indemne, je pense. Mais, d'un autre côté, ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, comme disait je ne sais plus qui...
L'ironie de l'affaire n'est-elle pas qu'en fin de compte les mots ne sont que du bruit ordonné, et les idées qu'un tas de préjugés mal agencés qu'on a omis de vérifier ?
J'ai raconté déjà, cent fois... mille fois que je ne suis pas homme à idées. Que ça m'emmerde, les idées... Absolument! Des idées, à quoi bon?
Sincèrement... les bibliothèques, encyclopédies, universités en débordent d'idées... Colloques! Séminaires! Systèmes! Doctrines! Préceptes! Hypothèses! Foutaises! Des idées en potage! Bouillon! En neige! Effervescence! Mayonnaise en cervelles! Des idées à la tonne... Les académies sont remplies d'hommes à idées, alors qu'est-ce que vous voulez que j'en foute? Y a plus la place...
Des excellentes parfois, je l'admets! Fameuses même... Juteuses idées surtout! Pagaille d'idées! Escroqueries! Les idées ça sert à justifier la merde dans laquelle on se vautre allègrement depuis l'aube des millénaires. Car, faut bien le dire une fois pour toutes, rarement originales les idées de nos bonzes en queue de pie... Intellos d'acabits! Penseurs de sacristies! Abuseurs égalitaires! Leur but est de nous embobiner dans des massacres infinis au nom de leur Cause et peu importe laquelle pourvu qu'on s'asticote à la baïonnette... et tant qu'on peut.
J'ai tout dit tout ça cent fois... mille fois, mais personne m'écoute... personne me lit non plus. Alors bonjour les quiproquos, forcément ça peut pas rater les malentendus, les ambiguïtés... les engueulades! Céline a dit ça! Céline pense ceci! Céline écrit comme cela! Merde! On entend bien ce que l'on désire entendre! Alors pour les idées, vous repasserez.
Ce qui m'intéresse, c'est le dire. Peu importe le morceau... Juif! Boche! Soviet! la manière de rendre qui compte. L'émotion que ça suscite... la petite musique qui sonne, qui attise. Accroche! Résonne! Qui provoque les sentiments! C'est ce qui est intéressant, pas le contenu, tout ça c'est du déjà vu! Du mou! Déjà entendu! Merde! Cinq mille ans que l'on cogite les mêmes songeries, conneries, invasions et massacres au nom des curetons ou du bonheur universel. Regardez où nous en sommes... Des idées? Nom de dieu! Joufflues de la tronche d'avoir tant d'idées à la fois.
Et je sais de quoi je cause!
LFC
Je n'aurai pas dit mieux...
Et je rajouterai, les idées sont faites pour ceux qui n'en ont pas!!!
(On va encore dire que je dis n'importe quoi tu vas voir)
Citation: je ne sais plus si c'est Oui-Oui ou Dragonball Z qui a dit: La philosophie c'est le chaos (ou le KO)!
Et j'aime toujours autant Céline... Je sais, c'est pas original... Mais c'est plus fort que moi ;-)
Moi itou, inconditionnel de l'écrivain comme aurait dit le grand humoriste Bigard.
Celine c'est surtout un auteur pour les juifs!!!
T'as raison c'est le grand humoriste Dieudonné qui a dit moi itou.
Bon on ne redémarre pas ce débat à la con. Céline est un grand écrivain qui soignait son mal de vivre par des méthodes stupides mais Céline est un grand écrivain. Point barre_
A voir aussi mort a crédit et voyage au bout de la nuit dessiné par Tardi(ca c'est un scoop hein ?). Et meme les interviews vocale sur 4 CD qui sont pas mal.
Bon, moi qui suit un adepte du bonheur, je comprends mieux maintenant la cause de l'imperfection de mes écrits. Mais tant pis, je préfère rester heureux.
Tardi je connais. Il y a aussi Casse-Pipe.
Les CD je vais voir.
« L’humour est la politesse du désespoir » est une formule d'Oscar Wilde.
A propos d'Oscar, une certaine Marie de mes amies plaçait systématiquement la même citations (que j'ai oubliée - es-tu là Marie?) dans ses dissertaitons avec une explication toute faite. En général cela marchait bien. Au bac elle a eu une bonne note.
Comme disait Oscar Wilde, l'inventeur des JOs "l'important c'est de participer".
Exact. Un écrivain heureux, ce n'est pas sérieux. Mais tout de même, je préfère les malheureux. Car les bienheureux ont une profondeur trop rare; tout ces légers et ces superficiels sont heureux car légers et superficiels: en réalité, la seule "via" vers le bonheur profond et bouddhique, ce premier pas, est celui du désespoir. Ce désespoir est une réaction à la légereté. Une réaction à l'homme, de l'homme qui aspire à des niveaux de conscience plus élevés. Ce désespoir est fondamental et esthétique. Ceux qui parviennent au bonheur, ensuite, sont exceptionnels. (C'est ceux-là, qui sont anersophron.)
"Les idées ça sert à justifier la merde dans laquelle on se vautre allègrement depuis l'aube des millénaires."Voudrais- tu le redire dans un commentaire sur la zetetique,mon cher Joel?
Pardonnez mon imperfection,mais je ne peux m'abstenir de revenir aussi loin,car voyez-vous:
Ici,on peut à la fois debattre du rôle de l'écrivain,de la zetetique,de l'infocondrie....Tous ces sujets se retrouvent liés,à moins que mon sens de synthese-mathematique ne me joue encore des tours!
Pour le bonheur,j'ai trouvé ceci:
http://ecrivain-forment-gotard.blogspot.com/2005/12/moi-et-moi.html
Le reste arrive.
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