mont-Blanc 4
04/09/2008
« Je déteste le ciel bleu. Je le déteste parce que je suis sûr que ce matin il va en arriver 150 ou plus avec leurs trucs agressifs aux pieds. Des crampons. Crampons, tu parles, de pointes en fer et acérées en plus. Les premiers sont là d’ailleurs, ils n’ont même pas attendu le soleil, ils arrive par l'arête des Bosses, avec leur ridicule petite étoile jaune sur le front. Attachés pour la plupart. Cela fait des années que ça dure. Seul des jours pluvieux et neigeux comme hier me protègent de la foule.
Avant Balmat, ce faux jeton de Balmat qui avec le docteur Paccard a troublé mon sommeil millénaire, j'étais peinard. Seul le vent me faisait parfois perdre 50 cm de ma hauteur dans la nuit. En fait, c’est pas Balmat, c'est Saussure le coupable, c’est lui qui a commandité le crime, un genevois Horace Bénédict de Saussure, un aristocrate qui avait payé Balmat pour me grimper dessus. Voilà toute l'affaire ! C’était en 1786, au mois d’août déjà. Les mois d’août sont les pires. Regardez ces trois là, ils avancent comme de limaces...
En plus ce sont eux, si ça se trouve, qui font fondre la glace de me glaciers. Avant, j’allais, par délégation, en cascade jusqu’à Chamonix, aujourd’hui ma mer de glace devient aussi sèche que la mer d’Aral et mes Bossons ont raccourci comme un pull lavé à l’eau trop chaude. Il parait que c’est le CO2. C’est du moins ce que disait deux de ces messieurs ce matin. Cela fait fondre les séracs, les séracs tombent, comme des glaçons dans le Martini, et l’avalanche se déclanche. C’est pour ça que dimanche matin, vers 3 heures, il y en a une dizaine qui sont tombés du côté du mont-Blanc du Tacul (un petit cousin à moi, 600 mètres de moins, et pour un sommet ça compte). Les neuf ou dix, sous la neige, on les retrouvera dans 30 ans, au dégel. Tant pis pour eux ! La montagne est impitoyable mais eux aussi.
Bon, les voilà qu’ils redescendent ces trois là. Ils ont l’air contents de leur coup. S’ils ne se magnent pas le train il vont rater mon tramway. Le TMB. Eh oui, je suis assez fier d’avoir un tramway à moi tout seul. Un truc à crémaillère, c’est pas toutes les montagnes qui peuvent se le permettre.
Remarquez que je donnerais bien le tramway, les téléphériques et tout le tremblement pour retrouver ma glace et ma tranquillité d’avant Balmat. Allez bonne descente, les petits, et soyez prudents ! L'arête est raide. »
4 commentaires
Un seul mot : génial ! et moi, fou rire toute seule devant le Mac !
Amusant, je suis précisément en train d'écrire un texte sur Montblanc... en un seul mot ! les stylos... et crois moi c'est loin d'être aussi passionnant que ta superbe histoire.
Bonjour Joel,
1/ puis je reutiliser un de vos articles ("glacier ou glacon?") pour le mettre dans mon blog (http://compact.over-blog.com) dedie a la S.V. et au "zero achat d'objets neufs dans l'annee" ? Car je trouve que c'est important de dire que les adeptes de la SV sont tolerants, et qu'on fait ce qu'on peut... l'idee n'etant pas de se fouetter si on craque et qu'on achete un livre...
2/ je viens de realiser d'apres votre "logo/avatar" que vous ecrivez souvent dans le forum de la SV: peut etre allez vous pouvoir m'aider... Depuis plus de 6 mois, j'essaie de rentrer dans les discussions sans succes, on me repond tjrs que: " la clef d'activation que vous avez fournie ne correspond pas a celle de la base de donnees"... et pourtant j'utilise bien mon nom et mot de passe, que l'on me reconfirme regulièrement! Faut il etre informaticien pour pouvoir ecrire ds le forum???
Si vous avez 5 min un jour pour me repondre, je serai ravie, car je n'ai jamais obtenu de reponse de leur part et me sens terriblement frustree!
MERCI!
Quels crampons, ces alpinistes!
Françoise,
Ecrire sur des stylos c'est comme refleter des miroirs.
Hélène,
Impossible de retrouver cet article mais, je vous en prie utilisez ce que bon vous semble avec peut-être un lien sur la source. En fait, il n'a pas été publié ici mais là:
http://www.naturavox.fr/article.php3?id_article=2811
Pour l'accès au forum, je réponds par email.
Alain,
En plus ce sont des têtes de pioche (le nom que les montagnards donnent à leur piolet, semble-t-il)
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