Singularité 2
27/04/2013
Extraits et résumé de la préface de Gérard Klein* au livre de Vernor Vinge dans la collection SF –Science Fiction - du livre de poche. Il émet des doutes sur le concept de singularité :
On ne sait pas vraiment qui est à l’origine de l’idée de singularité mais son vulgarisateur est Vernor Vinge. Le concept est parfois attribué à John von Neumann, qui a travaillé, entre autre, sur les machines qui se reproduisent. En fait von Neumann ne croyait pas à la capacité des machines de reproduire l’activité du cerveau humain. C’est en 1965 que Gordon E. Moore énonce sa fameuse loi selon laquelle la puissance des circuits intégrés doublerait tous les ans, puis la corrigera en 1971 en retenant pour celle des microprocesseurs un intervalle de deux ans qui s'est remarquablement vérifié depuis.
Du coup, les écrivains de SF imagine une machine qui serait, en vertu de la Loi de Moore, capable d’intelligence « humaine ». Et, selon le scénario de la Singularité, les choses s'emballent. Son intelligence s'accroît exponentiellement. Et peu de temps après, l’humanité disparaît, comme l’annonce Paccalet.
Vernor Vinge a commencé à parler de la Singularité dans les années 1980 et a formulé ses idées dans son premier article sur le sujet en 1993 : l'essai "Technological singularity". Il y postule que, d'ici trente ans, l'Humanité aurait les moyens de créer une intelligence surhumaine mettant un terme à l'ère humaine. Depuis, la Singularité a été le sujet de nombreuses nouvelles et essais.
L'idée de Singularité technologique, dans ce sens apocalyptique, a-t-elle un fondement quelconque ?
Pour ma part, je ne le pense pas, ayant insisté dans plusieurs textes sur mon doute quant à la création ou à l'émergence de la moindre Intelligence Artificielle en dehors de la littérature. Au cours de la soixantaine d'années écoulées depuis la création de l'expression, aucun progrès fondamental, vraiment décisif, n'a été enregistré (…) L'idée que l'accumulation de microprocesseurs de plus en plus puissants en ferait surgir me fait invinciblement penser à la fable des singes enchaînés à des claviers qu'ils frappent frénétiquement jusqu'à produire l'intégrale des œuvres de Shakespeare, parties perdues comprises. Ni le temps, ni la quantité ne font rien à l'affaire.
Nous ne savons du reste pas vraiment ce qu'est l'intelligence humaine, et plus généralement biologique, et nous avons toutes les raisons de douter qu'elle soit fondée sur un code logique. Ce doute qui ne m'est nullement personnel a été fortement exprimé par John von Neumann dans son essai déjà cité. Les termes en demeurent d'une actualité confondante. Les tenants de l'Intelligence Artificielle forte constituent une espèce de secte aux accents quasiment religieux dont la ferveur n'a d'égale que la propension à quémander des crédits militaires ou universitaires.
* Gérard Klein est un économiste qui est aussi un écrivain et un immense et respecté éditeur de SF. Il a dirigé depuis 1969 la fameuse collection argentée Ailleurs et Demain chez Robert Laffont.
Lire la suite et l’intégrale ici qui se termine par :
Toute relation entre la science et la religion est impie.
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