Les pays immobiles
01/05/2006
Les Pays Immobiles
Bayon
Grasset
Sélection Livre Inter
Les Pays Immobiles est un roman inclassable, dit-on sur le site. D’ailleurs le sous-titre est romans au pluriel. On pourrait dire que ce sont 22 nouvelles mais sont-ce vraiment des nouvelles ? Apparemment, l’auteur ne l’a pas voulu. Impossible de résumer le tout à part prendre les 22 récits un à un. Il n’y a pas d’unité de temps, de lieu, de sujet… Chaque chapitre part dans sa propre direction.
Chapitre 1, une longue lettre à sa chérie. On est en Egypte, une lettre de l’autre bord du Nil, une lettre pas ordinaire, du style, du littéraire, pas vraiment d’information ou alors du pictural… C’est assez agréable façon exercice de style, phrase musicale, riches métaphores… Bayon attaque très fort. Un bon début pour le premier roman de la sélection Inter.
Pour le chapitre 2 on part en Bretagne, pays des calvaires, il y aurait une mini-histoire mais on a de la peine à la suivre.
Le chapitre 3, la place, est très court, il a pour sous-titre somnambulisme, on y trouve un drôle de mot « candomblé* » qui fait référence à un rite brésilien.
Voilà, je ne vais pas vous faire les 22 chapitres.
Le 19 revient aux calvaires, le 20 au somnambulisme.
Le 16, la bourbouille, m’a paru être un sujet de nouvelle particulièrement intéressant. C’est l’histoire d’un architecte blanc, colonialiste ou néo-colonialiste, que l’on croise dans un hôpital dans un état peu ragoûtant. Bergerac, notre homme, est homosexuel et exploite son boy, Rigobert, joli garçon noir, de toute les manières et notamment en l’obligeant à vivre nu dans la maison, y compris pendant les réceptions. Le détail qui ne s’invente pas, on demande à l’architecte de construire un monument pour commémorer l’indépendance de cette ex-colonie portugaise et Bergerac construit un édifice phallique que l’on pourrait imaginer à la gloire de Rigobert. Exercice de style dont Bayon tire quelque chose d’étonnamment tarabiscoté et artificiel.
Pour finir ce résumé, je relis quelques paragraphes et je suis étonné à la seconde lecture de la vitesse à laquelle je passe de l’intérêt le plus vif pour cette écriture alambiquée, ultrasophistiquée à l’exaspération urticante que me procure le massacre syntactique et l’inversion des mots dans la phrase auquel se livre Bayon sans borne ni bonne raison, du moins me semble-t-il.
*Le candomblé est à la fois un genre musical qui trouve ses sources dans les percussions amenées par les esclaves, un peu à l'image de la santeria de Cuba. et une forme de religion issue du mélange du catholicisme, des rites indigènes et des croyances animistes africaines. Il est à distinguer du candombé que l'on retrouve en Uruguay. Il existe deux formes principales du candomblé, et selon certains, celui-ci serait à l'origine du samba.
**Né outre-mer en 1951, bayon est journaliste. il a notamment publié, chez Grasset, les Animals (prix Interallié 1990), La route des gardes (1998), Le lycéen (2000), Gainsbourg raconte sa mort (2001)
Extrait de la Bourbouille :
Ce volumineux poupon écarlate poudré, ce lourd garçonnet âgé, tout souffrant, soufflant, enflé, faisait peine et mal à voir, honte. Comme exprimant on ne savait quoi. Dans notre cerveau, nos nerfs, nos fantaisies natives, en pure devination (sic) je sus que cet homme artiste et seul et nu et rouge sous le blanc était un malade - ce qui se voyait assez -, mais que tout à la fois sa maladie insidieuse, lui collant à la peau à la consumer, était le mal d'amour des garçons (Je ne me dis pas cela; je le sus absolument, d'une certaine façon innée qui fait que je ne le sais qu'à présent, à le saisir en retranscription de l'indistinct), et que c'étaient ses goûts, penchants, moeurs garçonnières, qui avaient entraîné chez lui cet accès si physique et spectaculaire, telle une plaie vive manifeste, justifié cette mortification exquise : une véritable punition corporelle distinctive sous cette forme dévorante, corruptrice, éclatante de puérilité critique rongée d'une brûlure insignifiante d'infamie affichée.
1 commentaire
Site tout à fait remarquable!
Une façon trivial de parler de mon site:
"Et d'en passer des heures devant la grille du lycée à se parler sur un pied et à cloper sans trop réfléchir. Heureusement.
Heureusement je suis dans le désert maintenant. Mimou déshabillé les couilles dans le sable. Moi sur la moquette et j'ai froid."
La suite sur http://hirsute.hautetfort.com
Cordialement
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