La chambre de la Stella
27/04/2006
La chambre de la Stella
Jean-Baptiste Harang
Grasset
Sélection du Livre Inter
Pièce après pièce on explore la maison d’enfance du narrateur et de l’auteur. Une maison sise à Dun-le-Palestel dans la Creuse non loin de la Souterraine. Parmi les pièces, il a la chambre de la Stella qui cache on s’en doute un mystère. En même temps que l’on visite la maison, une pièce nommée « la gare » où le grand père vendait des billets de train, la chambre d’Arthur, la salle à manger, l’escalier, le grenier… on explore les souvenirs de l’auteur. Des souvenirs d’une grande précision dans les détails, pleins d’énumération à la Vialatte, et flous dans les grandes lignes. Volontairement flous parfois, l’auteur ayant refusé d’en savoir plus, de chercher plus, mais aussi involontairement quand les données se dérobent, quand la mémoire s’est enfuit.
Quel est ce mystère qui se cache dans la chambre de la Stella ? L’auteur ne cherche pas à nous tenir en haleine, il ne dissimule pas longtemps que son secret tient dans l’origine de son père qui, à dix ans, a changé de nom, de Quisserne il est devenu Harang. Le but principal est d’exhumer à la manière d’un archéologue, une époque, le milieu du siècle passé, que le lecteur trouve lointaine (et pourtant Harang a mon âge) : la mémé d’Dun qui bassine son lit aux briques chaudes, les cadres des tableaux faits de munitions de la guerre, le cousin Arthur que la mémé n’aimait pas, la petite Marie, une vieille de l’hospice qui chaque dimanche vient manger sa tranche de cake, une ville autrefois riche de petits commerces… Et les souvenirs qui hantent : une mère peu aimante, un père a qu’on a jamais compris, a qui on a posé les mauvaises questions… La vie, notre vie, qui passe sans que l’on comprenne très bien, sans que l’on ne retienne aucun grain du sablier…
Jean-Baptiste Harang ne soigne pas le suspens mais il soigne le style. Ses descriptions sont longues et nombreuses mais elles ne lassent pas. On les déguste comme des tranches du cake de la grand-mère. Son livre a un petit côté suranné, pas seulement dans son sujet mais aussi dans sa manière. Une écriture de l’autre siècle, des paragraphes faits sur mesure pour y tailler des dictées pour les élèves attentifs aux détails mais aussi pour les distraits.
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Né en 1949 dans la Nièvre, Jean-Baptiste Harang fait partie de la rédaction du "cahier livres" de Libération. Il est l'auteur chez Grasset du Contraire du coton (1993), Les Spaghettis d'Hitler (1994), Gros chagrin (1996) et Théodore disparaît (1998).
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Extrait :
'Un jour mon père a dépendu un homme qui ne lui était rien, mon père n'a connu que des hommes qui n'étaient pas son père, on lui en trouva un, de père, lorsqu'il avait dix ou douze ans, on changea son nom, et même son prénom pour le défaire de son passé, il s'appelait Raymond Quisserne et devint tout à trac Roger Harang, il nous a donné ce nom d'emprunt sans nous dire jamais qu'il n'était pas le sien. Un soir, il a couché sur un lit fait le cadavre d'un homme, un voisin qu'il venait de dépendre, il n'était pas son père, il le portait contre lui comme un noyé évanoui. Je ne veux pas que cette histoire ou l'on décroche des pendus figure où que ce soit. Elle reste malgré moi, elle visite chaque page de ce que je vais dire maintenant.'
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